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PETER MERTENS – LA GUERRE ECONOMIQUE PREPARE LA GUERRE MILITAIRE


Peter Mertens est SECRETAIRE GENERAL DU PARTI DU TRAVAIL DE BELGIQUE
Entretien réalisé par William Bouchardon et Amaury Delvaux, avec l’aide de Laëtitia Riss. 26 novembre 2023
Érosion de l’hégémonie du dollar, « mutinerie » des pays du Sud contre la politique étrangère occidentale, montée en puissance des BRICS, guerre économique des États-Unis envers la Chine… Le système international né de la fin de la Guerre Froide, dominé par l’hyperpuissance américaine, est en train de s’effondrer et de laisser place à un nouvel ordre mondial multipolaire. Plutôt que de prendre acte de cette nouvelle donne et de diversifier ses liens avec le reste du monde, l’Europe s’aligne toujours plus sur Washington. Mais est-il encore possible de mettre en place une politique altermondialiste, alors que les BRICS se comportent parfois eux-mêmes de manière impérialiste ? Peter Mertens, l’affirme, à condition de prendre un tournant radical dans notre politique étrangère.
Le Vent Se Lève – Vous venez de publier Mutinerie. Comment notre monde bascule ( en français aux éditions Agone- mars 2024) afin d’analyser les recompositions du système international. Quel est votre parcours au sein du PTB?
Peter Mertens – J’ai été président du Parti du Travail de Belgique (PTB) entre 2008 et 2021, puis Raoul Hedebouw a pris ma succession. Avec d’autres membres, j’ai participé au nécessaire renouveau du parti (tout en conservant un socle idéologique marxiste) à partir du milieu des années 2000, où nous étions alors un petit parti aux tendances sectaires. Ce renouveau nous a pris plus de 10 ans. Nous devions construire un rapport de force et un parti de la classe travailleuse, capable de peser en Belgique.
Avec la croissance du parti, donc du travail, nous avons dédoublé le leadership du parti : Raoul Hedebouw est le président et le porte-parole et j’en suis le secrétaire général. Comme nous étions concentrés sur la construction du rapport de force en Belgique, nous étions moins occupés avec ce qui se passait à l’étranger. Désormais, nous sommes en train de remettre nos tâches internationalistes à la hauteur des défis d’aujourd’hui. Et sur ce terrain, nous sommes en contact avec des partis à la gauche de la social-démocratie, en Europe et ailleurs dans le monde. Grâce à ce leadership collectif, j’ai pu écrire ce livre, m’appuyant sur le service d’étude de notre parti, dirigé par David Pestieau, qui avec son équipe m’ont aidé à rechercher des documents, les textes de l’OTAN et de l’Organisation Mondiale du Commerce.
LVSL – Ces organisations occidentales sont au cœur du système international qui a été hégémonique jusqu’à récemment. Le titre de votre livre fait cependant référence à une contestation grandissante du règne de l’hyperpuissance américaine. Comment expliquez-vous que les pays du Sud soient de plus en plus réticents à s’aligner sur cette position?
P. M. – Le titre du livre vient d’une déclaration de Fiona Hill, une ex-membre du National Security Council américain (organe qui conseille directement le Président américain en matière de défense et d’affaires étrangères, ndlr). Selon elle, l’abstention de la plupart des pays du Sud Global sur les sanctions contre la Russie était une « mutinerie ». Soyons clairs : la majorité de ces États ont condamné l’invasion illégale de la Russie sur le territoire ukrainien, ce qui est logique vu que nombre d’entre eux ont été envahis de multiples fois et connaissent bien l’importance de la souveraineté.
Toutefois, concernant les sanctions, ils n’ont pas suivi Washington. C’est là aussi logique : un pays sur dix sur la planète subit, sous une forme ou une autre, des sanctions de la part de Washington. Ces pays savent très bien que les sanctions économiques sont des actes de guerre économique. Or, dans la majorité des cas, les conséquences de ces sanctions sont supportées par les peuples des pays en question et ces mesures n’ont aucun effet sur le régime politique en place.Ici, en Europe, nous ne nous en sommes pas rendus compte ; l’eurocentrisme nous aveugle. Le regard de la majorité des peuples du Sud Global sur les événements internationaux est pourtant très différent. J’ai récemment discuté avec beaucoup de personnes issues du Sud Global et j’ai constaté des moments de fractures profonds avec l’Occident. La 1°fracture est la guerre des États-Unis contre l’Irak en 2003, qui était illégale et basée sur un mensonge. Au Moyen-Orient, en Afrique, en Amérique Latine et en Asie, c’est un moment charnière majeur. La crise financière de 2008 constitue le 2° moment charnière. En Europe, cette crise nous a contraint à sauver les banques avec l’argent public et a eu pour conséquence l’austérité. Pour les pays du Sud, cette crise a été plus profonde encore et a montré la fragilité de l’hégémonie du dollar américain, autour duquel est organisé tout le commerce international.

LVSL – Renaud Lambert et Dominique Plihon s’interrogent en effet sur la fin du dollar dans le dernier numéro du Monde Diplomatique. De nouveaux accords commerciaux sont, par ailleurs, conclus dans d’autres monnaies et les banques centrales commencent à diversifier le panier de devises qu’elles ont en réserve. Est-ce une des conséquences de la guerre en Ukraine ?
P. M. – Cette érosion du dollar débute avec la crise financière de 2008. C’est à ce moment-là que l’idée des BRICS est réellement née, bien qu’il existe également d’autres raisons historiques à son émergence. Le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud se sont rassemblés car ils veulent faire du commerce sur une autre base que celle du néo-colonialisme, en mettant en place un système financier proposant des alternatives de paiements au dollar. C’est pour cela qu’ils ont créé une banque d’investissement dirigée par Dilma Rousseff, l’ancienne présidente du Brésil. Certes, le dollar reste hégémonique, mais cela constitue malgré tout une nouvelle donne.
Parmi leurs sanctions contre la Russie, les autorités américaines ont débranché la Russie du système international de paiement SWIFT, dont le siège est en Belgique. L’usage de cette puissante arme de guerre économique a entraîné une panique dans beaucoup de pays du Sud, car ils ont réalisé qu’elle pouvait aussi être utilisée contre eux. Avec ce genre de sanction, les États-Unis peuvent prendre en otage les pays avec leur propre argent ! Cela a sans doute incité certains pays à vouloir rejoindre les BRICS. Lors de leur dernier congrès à Johannesburg fin août, les BRICS ont accueilli 6 nouveaux membres (l’Argentine, l’Arabie Saoudite, l’Iran, l’Ethiopie, l’Egypte et les Emirats Arabes Unis), sur un total de 40 pays candidats. C’est un vrai saut qualitatif.
« Entre 2003 et 2023, il y a eu plusieurs moments de fractures majeurs entre l’Occident et le reste du monde ! Pourtant, la grande majorité des médias vit encore dans la période d’avant 2003. »
De ce point de vue, la guerre en Ukraine est en effet un autre moment charnière, en raison des sanctions. J’en citerai 2 autres. D’abord, la COP de Copenhague en 2009, où les pays occidentaux ont refusé de prendre des mesures fortes pour le climat et pour aider les pays pauvres face au changement climatique. Enfin, le refus des pays occidentaux de lever les brevets sur les vaccins contre le Covid-19, a marqué une fracture profonde face à un problème mondial.
Depuis le 7 octobre, la guerre contre la Palestine constitue un nouveau point de rupture, dont l’impact est le plus important. L’axe guerrier États-Unis-Israël pratique une violence extrême, pensant être au-dessus de toutes les lois internationales et pouvoir se permettre n’importe quoi. Mais cet axe est plus isolé que jamais. Partout dans le monde, le » deux poids deux mesures » est devenu évident.
LVSL – Outre le dollar et leur armée, les États-Unis disposent d’une puissance technologique redoutable, qu’ils utilisent pour faire avancer leurs intérêts. Les GAFAM espionnent ainsi le monde entier, tandis que de nouvelles rivalités autour des microprocesseurs se mettent en place avec la Chine. Est-il possible d’échapper à l’emprise des États-Unis en matière technologique ?
P. M. – Il faut regarder en face la puissance économique des BRICS : en termes de PIB mondial, ils pèsent plus que le G7 (qui regroupe ce qui était les 7 pays les plus industrialisés au monde, ndlr). Cette puissance économique constitue une différence avec le mouvement des non-alignés des années 60-70. A l’époque, les États-Unis ont pu tuer ce mouvement grâce à la dette. Puis l’URSS s’est effondrée et ils se sont retrouvés sans rivaux sérieux. Mais désormais, la situation est différente, en raison du poids économique de la Chine. La réaction des États-Unis est claire : ils lui ont déclaré la guerre économique. J’emploie le mot guerre de manière délibérée : la guerre commerciale prépare la guerre militaire. Les bateaux de l’OTAN qui encerclent la Chine et les sanctions prises par les États-Unis contre Pékin font partie de la même stratégie.
Dans mon livre, je cite Alex W. Palmer, spécialiste américain des microprocesseurs. En 2022, 2 dates sont importantes selon lui : le 24 février avec l’invasion de la Russie en Ukraine et le 7 octobre quand les USA ont pris les mesures pour interdire presque tout développement des microprocesseurs en Chine. Il considère que ces mesures sont un acte de guerre économique inédit, dont l’objectif est de détruire tout développement en Chine. Les États-Unis veulent entraîner l’Europe dans leur guerre économique contre la Chine. Récemment, Joe Biden a convoqué le premier ministre néerlandais Mark Rutte à Washington pour lui ordonner de cesser l’exportation vers la Chine des machines fabriquées par la firme hollandaise ASML, qui sont essentielles pour la fabrication des semi-conducteurs de dernière génération. Le1° ministre hollandais a accepté sans contrepartie.
« Les États-Unis veulent désormais entraîner l’Europe dans leur guerre économique contre la Chine. »
Les États-Unis sont inquiets de l’avance de la Chine dans les secteurs de technologies de pointe. Il y a de quoi : sur les 90 domaines les plus avancés au niveau des sciences et technologies, la Chine mène la danse dans 55 d’entre eux. Les États-Unis ne l’ont pas vu venir. C’est pour cela qu’ils réagissent par le protectionnisme et la guerre économique. Jack Sullivan (influent conseiller à la sécurité nationale auprès de Joe Biden) l’affirme de manière assez transparente : « C’est fini le globalisme d’avant ; il faut du protectionnisme ; c’est fini avec le néolibéralisme ; c’en est fini avec l’accès de la Chine au marché international. »
On constate la même dynamique sur les ressources énergétiques, qui ont toujours formé l’infrastructure du système capitaliste. Au XIXe siècle, c’était le charbon, puis au XXe le pétrole. De l’arrivée de British Petroleum en Irak en 1902 aux guerres du Golfe, d’innombrables guerres ont été menées pour le pétrole. Désormais, c’est la guerre des batteries qui est lancée : tout le monde se rue sur le lithium et les ressources pour l’électrification. Là aussi, ils se montrent très agressifs vis-à-vis de la Chine et des BRICS.
LVSL – Hormis cette opposition à l’hégémonie américaine, il est difficile de voir ce qui rassemble les BRICS. Par ailleurs, il existe de réelles tensions entre des pays au sein de ce bloc, notamment entre la Chine et l’Inde. Peut-on attendre quelque chose d’un groupe aussi hétérogène ?
P. M. – Aucune valeur ne réunit les BRICS ! C’est une association de pays strictement pragmatique, car c’est comme ça que l’ordre mondial fonctionne. La gauche a souvent une lecture erronée car elle pense en termes de morale et de « valeurs ». Or, l’impérialisme et les forces anti-impérialistes ne pensent pas en ces termes mais plutôt en termes de pouvoir politique et économique. Les BRICS ne sont pas un projet de gauche, mais un projet pragmatique visant à servir les intérêts de ces pays, en créant une alternative au dollar et au Fonds Monétaire International et en cherchant à favoriser le commerce Sud-Sud.
L’Inde connaît de grandes tensions avec la Chine et Modi est un homme d’extrême-droite. Ses 3 grands amis étaient Jair Bolsonaro, Donald Trump et Boris Johnson. Il est responsable de l’assassinat de + de 750 paysans lors de la plus grand révolte de l’histoire indienne de la paysannerie et a laissé des razzias racistes contre les musulmans avoir lieu.
En Arabie Saoudite : c’est le despotisme total. Il n’y a aucune liberté pour la classe travailleuse et pour les femmes. Il n’empêche que l’entrée de l’Arabie Saoudite dans les BRICS marque un tournant. En 1971, avec les pétrodollars, les États-Unis ont promis à l’Arabie Saoudite d’avoir toujours des armes et une stabilité politique en échange de pétrole bon marché. Désormais, l’Arabie Saoudite vend son pétrole à la Chine non plus en dollars, mais en yuans ! Bien sûr que c’est un régime haïssable. Mais en matière de politique internationale, on ne peut pas juste réagir émotionnellement en fonction de « valeurs », il faut analyser l’échiquier mondial avec réalisme. Et la réalité est que les BRICS défient le système construit autour du dollar.Sans soutenir les régimes de certains pays des BRICS, leur émergence est une bonne nouvelle parce qu’elle défie l’unilatéralisme et l’hégémonie américaine pour la première fois depuis 1991.
« LA DETTE DES PAYS DU TIERS MONDE DOIT ETRE PAYEE EN DOLLARS. C’EST UN MECANISME NEOCOLONIAL ! »
Mais en parallèle de la mutinerie menée par les BRICS, il y a également une mutinerie au sein de ces pays: en Inde, les luttes des paysans, des femmes et de la classe travailleuse contre le régime de Modi. L’Afrique du Sud connaît une corruption énorme, le fossé entre riches et pauvres y est considérable et le régime politique est fortement critiqué par la population. Lula est un progressiste, mais son gouvernement n’est pas pour autant socialiste. Et les concessions faites aux grands propriétaires fonciers au Brésil, s’opposent à ceux qui luttent pour les droits des paysans, comme le Mouvement des Paysans sans Terre.
LVSL –Vous rappelez l’histoire du mouvement tiers-mondiste, à partir de la conférence de Bandung en 1955. Ce mouvement était porteur d’espoir pour un rééquilibrage des relations internationales et de l’économie mondiale. Croyez-vous à la résurgence de l’altermondialisme ? Les tentatives consistant à faire revivre cet esprit de « non-alignement », de la part de Lula, vous semblent-elles prometteuses ?
P. M. – Je crois que la tentative opérée par les BRICS de permettre un commerce dans d’autres monnaies que le dollar relève du pragmatisme. Mais cette démarche est déjà un acte progressiste en soi. Regardons en face la situation depuis les années 50-60 : la dette des pays du Tiers Monde doit être payée en dollars. Cela signifie que ces pays doivent privilégier des monocultures tournées vers l’exportation, plutôt que des productions au service de leurs propres populations, afin d’obtenir des dollars. Et quand ils ont des difficultés à refinancer leur dette, le FMI ne leur octroie des prêts qu’à condition de couper dans les services publics, les salaires et les pensions et de privatiser davantage. Tout cela ne fait que les rendre plus dépendants. C’est un mécanisme néocolonial ! Désormais, pour la 1° fois, les pays du Tiers Monde peuvent refinancer leur dette, indépendamment du FMI, grâce à la banque des BRICS. Certes, ce n’est pas un emprunt socialiste mais c’est un mécanisme honnête et sans conditions Ce n’est un progrès en direction du socialisme, mais cela reste un progrès pour les pays du Sud Global, qui doit être soutenu.
Certes, cela ne suffit pas pour construire un altermondialisme de gauche. C’est pourquoi nous devons aussi soutenir les mouvements de gauche dans ces pays, afin de peser sur l’agenda politique. On peut tout à fait soutenir le MST au Brésil pour mettre la pression sur Lula, tout en reconnaissant qu’il joue un rôle important pour nos idées au niveau international, et soutenir le NUMSA, le syndicat des métallos sud-africains, qui lutte contre la corruption au sein du gouvernement de l’ANC, tout en étant en accord avec la politique extérieure de l’Afrique du Sud.
« L’altermondialisme passe aussi par une forme de pragmatisme sur les enjeux internationaux. »
LVSL – L’Union européenne tend à s’aligner sur les États-Unis, contrairement à ce qu’affirment nos dirigeants. S’ils prétendent réguler l’action des GAFAM, ou encore bâtir une « autonomie stratégique » en matière internationale ou de réindustrialisation, la réalité est que nous sommes de plus en plus dépendants des Américains, y compris dans des domaines où cela était encore peu le cas, comme les énergies fossiles. Comment peut-on retrouver une véritable autonomie ? Cela implique-t-il une rupture avec l’Union européenne ?
P. M. – Ce qui s’est passé en Europe suite à la guerre en Ukraine, surtout en Allemagne, est grave. Quelques semaines après le début du conflit, le Bundestag a renié sa politique de non-militarisation de l’économie vieille de 75 ans et a investi plus de 100 milliards d’euros dans le budget de la défense. Tout ce qui existait en termes de liens avec la Russie, de la part de la social-démocratie allemande dont les liens avec Gazprom, de Schröder, l’ancien chancelier allemand qui a siégé au conseil d’administration de la compagnie russe, est le symbole, a été détruit en quelques semaines à peine; les États-Unis ont réussi à briser cela.
Cette coupure brutale avec la Russie a suscité des remous au sein des grandes entreprises allemandes : les grands patrons de BASF, de Bosch ou Siemens ont demandé au gouvernement allemand de ne pas rompre les liens avec Gazprom, car ils souhaitaient continuer à bénéficier du gaz russe bon marché. En se rendant dépendante du gaz américain, beaucoup plus cher, l’Allemagne est rentrée en récession. En prenant des sanctions contre la Russie, l’Europe a donc pris des sanctions contre elle-même et s’est tirée une balle dans le pied. De surcroît, avec l’Inflation Reduction Act (IRA), les États-Unis tentent d’attirer sur leur territoire des firmes européennes de technologie de pointe, grâce à d’importantes subventions et remises d’impôts. La réaction de l’Union Européenne à cette offensive américaine a été très faible. Aucune politique industrielle européenne autonome n’émerge.
Les États-Unis veulent maintenant répéter cela avec la Chine. C’est une folie : non seulement ils auront beaucoup de mal à se couper de la Chine, mais l’Europe en aura encore plus : nous échangeons avec la Chine 850 milliards d’euros de marchandises chaque année ! La neutralité carbone en Europe dépend pour l’instant de la technologie chinoise.On ne peut qu’être d’accord avec les patrons de Bosch, Siemens, Volkswagen et Mercedes quand ils demandent de ne pas reproduire avec la Chine ce que l’Europe a fait avec la Russie. Dans le conflit inter-impérialiste entre capitalistes. On peut espèrer que la bourgeoisie européenne se comportera de manière sérieuse et dira non à la bourgeoisie américaine qui veut nous entraîner dans de nouveaux conflits.
Aucune illusion ! La bourgeoisie européenne ne veut pas une Europe progressiste,et cherche à imposer aux peuples européens une nouvelle dose d’austérité. Elle entend conserver des relations néo-coloniales avec une partie du monde, bien que le rejet de la France en Afrique ne cesse de grandir. Mais il faut jouer sur leurs nombreuses contradictions.
LVSL – Il est vrai que les sanctions prises à l’encontre de la Russie ont renforcé la dépendance de l’Europe vis-à-vis des États-Unis. Est-il possible de réorienter l’Union européenne vers une politique socialiste ? Ou faut-il rompre avec les traités européens et construire de nouveaux cadres de coopération ?
P. M. – Ma position sur cette question est liée à l’histoire belge : nous sommes un petit pays qui a été créé pour jouer le rôle d’État-tampon entre l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Un changement de société au niveau de la seule Belgique, ça n’existe pas! ! Je plaide donc pour une autre société, une autre industrialisation et une autre forme de commerce à l’échelle continentale. Cela passera par plus d’échanges entre ceux qui luttent et qui résistent dans toute l’Europe pour créer une rupture au sein de l’Union Européenne.
La dépression collective de la gauche européenne passe son temps à se lamenter de la percée de l’extrême-droite! En Amérique latine ou en Inde, eux aussi s’inquiètent de la montée du fascisme, mais ils luttent. Pour reconquérir une partie de la classe travailleuse tentée par le vote fasciste, il faut rompre le narratif dépressif, selon lequel la classe travailleuse n’existe pas et l’immigration va nous détruire. Face à l’extrême-droite, il faut recréer un narratif autour de la lutte des classes et rebâtir une conscience commune chez les travailleurs. Les mobilisations sociales massives que nous avons connu récemment en Angleterre, en Allemagne et en France sont des points d’appui. Comme la grève des ouvriers de l’automobile aux États-Unis, avec une belle victoire à la clé ! Et puis nous devons être là où sont les gens, dans les quartiers populaires et sur les lieux de travail. Par exemple, avec notre programme Médecine pour le peuple (initiative de médecine gratuite dans les quartiers populaires), on touche des personnes qui votent pour le Vlaams Belang (extrême-droite indépendantiste flamande). Plutôt que de les exclure, nous discutons avec eux et tentons de les convaincre. Les gens sentent si vous êtes honnêtes. Donc il faut un langage clair et franc, comme celui de Raoul Hedebouw, qui permet d’attirer vers nous des gens en colère en raison de leur situation précaire et de politiser cette colère.
Cet article est publié pour l intérêt qu’il présente dans le but de contribuer et d’enrichir les discussions et débats actuels.
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Vijay Prashad -Marxisme


À propos de Vijay Prashad
Vijay Prashad est un historien, éditeur et journaliste indien. Il est rédacteur et correspondant en chef chez Globetrotter. Il est rédacteur en chef de LeftWord Books et directeur de Tricontinental : Institute for Social Research. Il est chercheur senior non résident à l’Institut Chongyang d’études financières de l’Université Renmin de Chine. Il a écrit plus de 20 livres, dont The Darker Nations et The Poorer Nations. Ses derniers ouvrages sont Struggle Makes Us Human: Learning from Movements for Socialism et (avec Noam Chomsky) The Withdrawal: Iraq, Libya, Afghanistan, and the Fragility of U.S. Power.
À propos de Zhao Dingqi
Zhao Dingqi est chercheur assistant à l’Institut de marxisme de l’Académie chinoise des sciences sociales et rédacteur en chef de World Socialism Studies.
Zhao Dingqi : Pourquoi êtes-vous devenu marxiste ? Pouvez-vous nous présenter brièvement votre parcours personnel et universitaire ?
Vijay Prashad : J’ai grandi à Calcutta, en Inde, puis dans le nord du pays. Pendant ma jeunesse, j’ai été profondément marqué par la pauvreté qui régnait dans les villes et les campagnes. Les inégalités grotesques de la vie et l’omniprésence des relations sociales de type féodal (en particulier la hiérarchie du système des castes) me révoltent profondément. Mes parents m’ont élevé dans le respect des valeurs de décence et de bonne conduite, qui semblaient impossibles à maintenir dans une société indécente. J’étais en colère contre le monde, puis lorsque j’ai commencé à m’impliquer dans de petites luttes et à lire Marx, j’ai réalisé que ma colère était nécessaire mais insuffisante. J’avais besoin d’appartenir à une organisation, j’avais besoin d’une théorie de la transformation sociale, j’avais besoin de discipline. C’est ce qui m’a poussé à mener une étude académique plus sérieuse sur les racines de l’inégalité sociale en Inde (le sujet de ma thèse de doctorat, qui portait sur l’histoire sociale d’une communauté de caste opprimée) et à lutter contre les conditions qui empêchaient la transformation sociale (ce qui m’a attiré vers le mouvement de gauche).

ZD : Quelle est la signification du marxisme au XXIe siècle ? Le marxisme est-il, comme certains le croient, dépassé et inadapté à l’époque actuelle ?
VP : Le marxisme, qui est un domaine d’analyse en constante évolution, est la critique la plus précise du capitalisme. Tant que le capitalisme existera, le marxisme devra perdurer jusqu’à ce qu’une autre forme de critique, meilleure que le marxisme, apparaisse. Jusqu’à présent, aucune critique plus claire du capitalisme n’a été développée. Il est vrai aujourd’hui, comme en 1867, lorsque Marx a publié Le Capital, que l’exploitation de la classe ouvrière produit une plus-value et que c’est cette plus-value qui crée l’accumulation de capital entre les mains des capitalistes et appauvrit les travailleurs, et que c’est cette accumulation de capital entre les mains de différents capitalistes qui se font concurrence qui crée les conditions d’une crise générale dans la société. S’il existe une meilleure explication de ces crises qui nous affligent, je ne la connais pas.
Inde
ZD : Au cours des dernières décennies, l’économie indienne s’est développée rapidement, mais sous le système capitaliste, diverses contradictions au sein de la société indienne sont également très aiguës. Quels sont les principaux conflits sociaux auxquels l’Inde est actuellement confrontée ? À quelle oppression sociale le peuple indien est-il confronté ?
VP : L’économie indienne connaît une croissance rapide en raison d’une forte demande refoulée qui a commencé à s’installer dans le pays après la phase initiale des réformes de l’après-indépendance. Il fallait combler un déficit en infrastructures, ce qui n’a pas été entièrement réalisé, mais cela explique en partie la croissance. Cette croissance est toutefois inégale. L’un des grands problèmes de l’économie indienne est l’incapacité de l’État à mener à bien une réforme agraire et à créer ainsi les conditions d’une relative égalité sociale dans les campagnes. Les inégalités sociales criantes, exacerbées par la hiérarchie des castes, font que les anciennes formes de subordination restent intactes et sont même aggravées par l’augmentation de la richesse des couches les plus puissantes de la société. On assiste donc à une croissance, mais une croissance très inégale et inéquitable. Cela crée de grands troubles sociaux, qui sont réprimés par les instruments de force de l’État (à la fois l’appareil juridique utilisé pour qualifier les dissidents d’antinationaux et l’appareil de violence qui réprime durement les protestations sociales, y compris celles des agriculteurs).

ZD : Quel est l’état actuel du développement du mouvement communiste en Inde ? Quels sont les principaux partis et organisations politiques marxistes ?
VP : Le mouvement communiste en Inde est faible en raison de l’épuisement des réserves de force nécessaires à un tel mouvement, c’est-à-dire la faiblesse du mouvement syndical dans les secteurs manufacturier et des services, et la faiblesse du mouvement des travailleurs agricoles dans les campagnes. L’organisation de la classe ouvrière, tant urbaine que rurale, est faible en raison des formes de désarticulation de la société et du lieu de travail qui caractérisent l’ère néolibérale. Si la classe ouvrière est affaiblie, la gauche est affaiblie. Il existe trois principaux partis du mouvement communiste : le Parti communiste indien (marxiste) ou CPIM, le Parti communiste indien ou CPI, et le Parti communiste indien (marxiste-léniniste) Libération ou simplement Libération. Ce sont les partis légaux qui jouent un rôle au sein des parlements national et provinciaux. Il existe également le Parti communiste indien (maoïste), qui est interdit et opère dans les campagnes. Le nombre total de membres de ces partis se chiffre en centaines de millions, mais cela n’est toujours pas suffisant pour faire avancer un programme décisif à l’heure actuelle.
Sud global
ZD : Quand le concept de Sud global a-t-il été proposé ? Comment comprenez-vous ce concept ? Que signifie-t-il aujourd’hui ?
VP : Le Sud global est une idée qui a été portée pour la première fois à l’attention du monde entier par la Commission Brandt (1980), où le Sud désignait les pays en proie à la pauvreté, par opposition au Nord, qui désignait les anciennes puissances coloniales. Ce concept a été développé par la Commission du Sud (1989), présidée par l’ancien président tanzanien Julius Nyerere et comptant parmi ses membres un commissaire chinois, Qian Jiadong, ancien assistant de Zhou Enlai et beau-père de Wang Yi, l’actuel ministre des Affaires étrangères de la Chine. Le concept de la Commission du Sud a été développé pour désigner les pays en développement qui devaient établir un programme pour leur développement, et pas seulement les pays enlisés dans la pauvreté. C’était un progrès. La Commission du Sud, qui avait étudié les développements déjà assez remarquables de la région chinoise de Shenzhen, a fait valoir que la dépendance n’était pas permanente et qu’un changement pouvait intervenir grâce au transfert de technologies et à une bonne exploitation des ressources nationales. C’était bien plus que ce qui avait été proposé dans l’ancien programme de modernisation et de développement.
ZD : Dans votre livre The Poorer Nations: A Possible History of the Global South (2013), vous proposez que le terme « Sud global » ne désigne pas un espace géographique, mais une série de protestations contre le néolibéralisme. Pourquoi pensez-vous cela ?
VP : Au début des années 2010, une série de manifestations ont eu lieu dans les pays du Sud contre le régime d’austérité imposé par le Fonds monétaire international. À l’époque, il semblait qu’aucune solution à la misère n’était possible. Les manifestations elles-mêmes semblaient définir l’ère post-crise financière (2007). Mais ensuite, un changement très intéressant s’est produit, que j’ai noté dans mon livre sans toutefois en faire une théorie. Il s’agissait de l’émergence d’un Sud plus confiant, que j’ai ensuite appelé le nouvel état d’esprit du Sud. La formation des BRICS en 2009 en est un signe, tout comme l’insistance sur la nécessité d’une nouvelle théorie du développement et la création de nouvelles institutions financières et de développement (notamment la Nouvelle banque de développement, créée en 2014). Ces initiatives nous ont fait passer d’une période de protestations à une période de construction. La nouvelle architecture peut-elle commencer à supplanter le régime d’austérité imposé par le FMI ? Telle est la question de notre époque. Nous sommes confrontés à ce dilemme. Il est impossible de prédire avec certitude si l’approche du FMI prévaudra ou si une nouvelle théorie du développement avec une nouvelle architecture se mettra en place.

ZD : Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, bien que le colonialisme ait disparu de la scène historique, l’exploitation et l’oppression des pays du Sud par les pays impérialistes ont persisté, donnant naissance au néocolonialisme. Quelles sont les manifestations du néocolonialisme ?
VP : Le néocolonialisme est un terme utilisé par le président ghanéen Kwame Nkrumah en 1965 pour désigner la situation d’indépendance symbolique (il fut victime d’un coup d’État l’année suivante). Les pays ont acquis leur souveraineté politique, mais n’étaient pas en mesure de contrôler leur propre économie. Ce manque de contrôle s’explique par le fait qu’ils devaient emprunter de l’argent à l’étranger pour presque tout (même pour payer leurs factures du secteur public) et qu’ils devaient autoriser les entreprises étrangères à exploiter leurs ressources, car ils ne disposaient ni du capital, ni de la technologie, ni de l’expertise nécessaires pour le faire. Ce manque de pouvoir financier et scientifique a laissé ces pays à la merci de leurs anciens maîtres coloniaux. À notre époque, les grandes lignes du néocolonialisme restent intactes pour de nombreux pays, exacerbées par la spirale apparemment sans fin de la dette. La dette extérieure totale des pays en développement s’élève actuellement à 11 400 milliards de dollars, et plus de 98 % des recettes d’exportation de ces pays sont utilisées pour rembourser les riches détenteurs d’obligations. Cela rend le développement impossible. Telle est la structure du néocolonialisme contemporain. C’est cette structure qui a donné naissance à la théorie de la dépendance, dont la formule a été formulée par Andre Gunder Frank comme « le développement du sous-développement ».
Chine
ZD : Quel impact l’essor du Sud global, représenté par la Chine, a-t-il eu sur l’ordre mondial ?
VP : La Commission du Sud a fait référence aux « locomotives » du Sud et a exprimé l’espoir que ces locomotives, qui avaient l’avantage de la taille (population et territoire), se développeraient rapidement et entraîneraient ensuite les autres pays dans le train du développement. D’une certaine manière, c’est précisément ce qui s’est produit. La Chine a brisé le cercle vicieux de la dépendance. La République populaire de Chine a bénéficié des réformes maoïstes qui ont permis de former une population bien éduquée et en bonne santé. L’épargne nationale et les investissements étrangers se sont combinés dans un système financier contrôlé par le gouvernement. Ce capital a été utilisé, parallèlement au transfert de technologies et de connaissances scientifiques, pour industrialiser le pays et renforcer ses forces productives globales. Une version moins spectaculaire de ce programme de développement socialiste a été mise en œuvre dans d’autres pays, comme le Vietnam, où les taux de croissance ont explosé. L’essor de la Chine a inspiré et entraîné toute une série de pays, dont l’Indonésie et le Bangladesh, qui n’auraient autrement pas pu imaginer les possibilités qui s’offraient à eux en dehors du piège de la dépendance. C’est grâce à la puissance de la Chine que l’Indonésie a pu interdire l’exportation de nickel non transformé et faire progresser sa propre industrialisation, et c’est grâce à la Chine que l’industrialisation est revenue sur le continent africain.

ZD : Comment comprenez-vous l’importance de l’initiative chinoise « Belt and Road » pour les pays du Sud ?
VP : La politique « Belt and Road » (la Ceinture et la Route), initialement formulée en 2013 sous le nom de « One Belt, One Road » (Une Ceinture, Une Route), était à l’origine étroitement liée à la volonté du gouvernement chinois de réduire sa dépendance vis-à-vis des marchés américains et européens après leur effondrement lors de la crise financière de 2007. Il est devenu évident à Pékin que les marchés du Nord ne seraient pas disponibles de manière permanente pour des pays comme la Chine. Afin de trouver de nouveaux marchés, Pékin a cherché à poursuivre la politique de développement occidental dans l’ouest de la Chine (y compris le Xinjiang, le Tibet et le Qinhai) lancée par Jiang Zemin et Hu Jintao, puis à l’étendre à l’Asie centrale. Mais au-delà de cela, la Belt and Road visait à construire des infrastructures dans l’ensemble du Sud afin de faciliter un développement économique plus harmonieux entre la Chine et ces régions. De 2013 à 2024, l’engagement de la Chine dans l’initiative « Belt and Road » a atteint un total de 1 175 milliards de dollars, incluant les investissements, les prêts et les dons. Il s’agit d’une transformation significative du programme de développement. Elle a été étudiée en partie, mais pas suffisamment dans son ensemble pour comprendre la théorie de l’initiative « Belt and Road ». J’espère que davantage de personnes accumuleront davantage de preuves provenant des sites de l’initiative « Belt and Road » et développeront une théorie appropriée du développement à partir de cette nouvelle expérience.
ZD : Vous avez mentionné que pour comprendre le cheminement de la Chine vers la modernisation, nous ne devons pas oublier ces trois années: 1949, 1979 et 2014. Pourquoi pensez-vous cela ?
VP : Il y a des moments dans l’histoire d’un pays où l’on peut ignorer l’ensemble de ses expériences pour mettre l’accent sur tel ou tel aspect. Dans la Chine contemporaine, il ne fait aucun doute que le programme de réformes lancé en 1978 revêt une grande importance. Mais cette insistance a parfois occulté les immenses réalisations de la révolution chinoise de 1949 et des réformes maoïstes qui ont suivi. Sans les réformes agraires, la transformation des relations sociales, la création d’institutions sociales pour gérer les finances et la propriété, et la formation d’une industrialisation précoce, les réformes économiques chinoises après 1978 n’auraient pas pu aboutir. La première date marquant la transformation de la Chine est donc 1949.
La deuxième date est 1978, car il a été reconnu que sans la transformation des forces productives, l’économie chinoise stagnerait et ne serait pas en mesure de subvenir aux besoins de sa population et de jouer un rôle internationaliste dans le monde. C’est pourquoi l’entrée de capitaux et de technologies a été autorisée, à condition qu’elle respecte le programme prévu du socialisme chinois. Cette entrée de technologie et de financement a permis à la Chine de moderniser ses forces productives et de devenir l’un des moteurs économiques les plus puissants du monde. C’est la deuxième date, qui est liée aux réformes de Deng.
La troisième date est 2014, lorsque deux faits sont apparus clairement : Premièrement, que les marchés nord-américains et européens ne seraient pas en mesure d’absorber les matières premières produites en Chine, et deuxièmement, que les capitalistes chinois ne devaient pas être autorisés à devenir une classe au sens politique du terme et que les inégalités devaient être éliminées autant que possible. Le mandat de Xi Jinping restera dans les mémoires comme l’époque où la Chine s’est détournée des marchés du Nord pour construire une structure de marché du Sud grâce à l’initiative « Belt and Road », où elle a considérablement empêché ses capitalistes d’exercer une influence politique (l’expérience de Jack Ma en est un exemple) et où elle a éradiqué la pauvreté absolue et accéléré son programme en faveur de l’égalité. Ces réformes de Xi sont indiquées par la troisième date, 2014. Nous verrons où cela nous mènera. Il y aura d’autres dates à l’avenir.
Trump

ZD : Quel impact le retour récent de Trump à la Maison Blanche aura-t-il sur les pays du Sud ?
VP : Trump a rejeté 35 ans d’idéalisme impérialiste américain et a réintroduit le réalisme de droite à la Henry Kissinger dans la politique étrangère américaine. Ce changement doit être pris en compte. Le gouvernement américain ne croit plus pouvoir façonner le monde à son image. Je pense que les États-Unis devront adopter un programme plus modeste, consistant à utiliser leur puissance pour faire passer leurs intérêts en premier, et qu’ils devront contrôler le monde tel qu’il est plutôt que de le transformer en quelque chose qu’il n’est pas. Il ne s’agit en aucun cas d’une avancée progressiste. La structure de l’impérialisme américain reste intacte. Mais les moyens seront différents. La force sera utilisée, mais pour faire avancer un programme servant les intérêts des États-Unis plutôt que ceux de la bourgeoisie mondiale. On ne sait pas encore comment la bourgeoisie du Sud réagira à ces développements. Il est probable qu’elle n’ait pas encore pris conscience que les États-Unis ne défendront plus ses intérêts, mais chercheront avant tout à obtenir le meilleur accord possible pour leur propre bourgeoisie. Cela va-t-il ébranler la foi dans la mondialisation qui a jusqu’à présent animé les bourgeoisies du Sud ? En d’autres termes, une fraction patriotique de la bourgeoisie va-t-elle apparaître dans le Sud ? Nous ne pouvons pas encore répondre à cette question. Il est certain que quelque chose de ce genre se produira probablement à terme si la bourgeoisie est capable de reconnaître ses intérêts de classe.
Trump n’est pas un ami du Sud. Il mettra tout en œuvre pour faire avancer son programme impérialiste. Ses conseillers, en particulier Elbridge Colby au ministère de la Défense, ont clairement indiqué que l’arrêt du développement économique et technologique de la Chine était la priorité de leur programme, et que cet arrêt s’étendrait aux développements rapides de tous les pays du Sud. Toute tentative d’un pays du Sud de faire valoir sa souveraineté sera attaquée par l’administration Trump. Les seuls intérêts qu’ils défendront sont ceux de la bourgeoisie américaine, et ils utiliseront la force pour s’en assurer. Toute illusion quant à l’engagement fondamental de Trump envers l’impérialisme a déjà été dissipée à Gaza.
ZD : Comment le Sud doit-il répondre aux défis que cela pose ?
VP : Le Sud doit rester vigilant et s’organiser pour faire progresser la souveraineté de ses États et la dignité de ses peuples. Nous aurons besoin de capacités organisationnelles accrues, notamment par la création d’un plus grand nombre d’organisations régionales et d’institutions qui exploitent le commerce et la coopération Sud-Sud. Il est utile de rappeler un paragraphe vers la fin du rapport de la Commission du Sud, The Challenge of the South (1989) : « Le Sud dans son ensemble dispose de marchés, de technologies et de ressources financières suffisants pour faire de la coopération Sud-Sud un moyen efficace d’élargir les options de développement de ses économies.
Le renforcement de la coopération Sud-Sud doit devenir un élément important des stratégies du Sud pour un développement autonome et indépendant. Le Sud doit renforcer ses capacités afin de maintenir un rythme de croissance rapide, même si le moteur du Nord tourne au ralenti. Avec les droits de douane imposés par Trump qui vont frapper la classe ouvrière américaine et réduire sa consommation d’au moins 2 500 dollars par an, les marchés américains ne seront plus une destination pour les pays du Sud. La coopération Sud-Sud devra s’intensifier. Mais la qualité de cette coopération est incertaine. Elle doit être harmonieuse, afin que chaque pays, aussi petit et pauvre soit-il, tire profit du développement et n’en soit pas détruit.
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Lettre pour le martyr qu’on veut faire oublier Mahmoud Bouhamidi mort avec Ali la pointe, Hassiba Ben Bouali et Omar Yacef dit Petit Omar.

Lettre pour le martyr qu’on veut faire oublier Mahmoud Bouhamidi mort avec Ali la pointe, Hassiba Ben Bouali et Omar Yacef dit Petit Omar par Fadela et Ghania Bouhamidi
Le 7 Octobre 2016
Ce 8 octobre beaucoup d’algériens se souviendront avec recueillement le sacrifice, le 08 octobre 1957 rue des Abderrames en pleine Casbah d’Alger, de Ali la Pointe, dernier responsable en activité de la Zone Autonome d’Alger, et de ses trois derniers compagnons.
Ils étaient quatre : Hassiba Ben Bouali, Omar Yacef dit Petit Omar et Mahmoud Bouhamidi, l’occulté de ce groupe de héros et de martyrs.
On ne parle que de trois
On oublie ou on occulte presque toujours Mahmoud.
Pour nous, Fadela et Ghania Bouhamidi, ses petites sœurs, les précédents anniversaires ont été des moments pénibles.
Son nom sera probablement oublié cette année encore.
Par la force de l’oubli répétitif, trop de jeunes et trop d’algériens croient aujourd’hui que les martyrs de la rue des Abderrames se résument à trois noms : Ali la Pointe, Petit Omar, Hassiba Ben Bouali.
Nous portons encore, pour ces trois noms une amitié, un amour, un respect, inégalables, le même que pour notre frère Mahmoud. Ils ne sont pas dans nos cœurs dans une concurrence de fraternité avec notre frère de sang, mais dans une unité totale.
Car, entre fin 1955 et octobre 1957, nous avons vécu près de deux ans dans cette maison de notre oncle Guemati, 4 rue Caton, transformée en véritable Quartier Général de la Zone Autonome d’Alger.
Ces trois martyrs, ainsi que Yacef Sadi et Zohra Drif, et parfois les frères Ramel, ont partagé notre maison, notre temps, nos repas, nos rêves et quelquefois notre jeu de la Boqala. Nous avons porté les couffins de Hassiba, nous avons porté les tracts et des messages cachés dans nos vêtements ou sous-vêtements. Notre mère et notre tante maternelle, Baya Guemati née Gharbi, mère de Mustapha Guemati dit Mustapha le coiffeur, se sont quotidiennement occupées de leur hygiène, de leur santé, de leurs repas et ont monté, pour eux, à tour de rôle la garde jour et nuit sur les terrasses.
Elles chauffaient leur eau, tous les matins, pour leur douche. La cache étroite faisait transpirer et ankylosait les corps.
Yacef Sadi et Zohra Drif, appelaient notre mère « Yemma Fettouma ».
Hassiba et Ali l’appelaient « El Khout »
Ali la pointe et Yacef sadi ont décidé de nous retirer de l’école pour des raisons impératives de sécurité. Ali nous a versé dans le travail de l’organisation, souvent sous la conduite de Mahmoud.
Pas une fois, pas une seule, leur présence n’a été trahie par nous-mêmes, par les autres enfants ou par nos parents.
Dans notre cœur, un souvenir est plus fort que tous les autres. Hassiba était blonde avec des yeux bleus. Pour la transformer notre mère colorait régulièrement ses cheveux au henné. Un jour elle lui a coupé ses cheveux très longs. Elle restera avec ses armes et son poignard le modèle de la beauté et de l’engagement.
De Zohra Drif, le souvenir est plutôt celui de sa machine à écrire que détectera la « poêle » des parachutistes et conséquemment la cache que nous avions si bien protégée.
Notre père avait une attention particulière pour Petit Omar, renforcée encore plus après son isolement forcé. Il lui ramenait des marrons, des cacahuètes, du maïs grillé, des noisettes. Petit Omar l’appelait Baba Menouer.
Le commerce de notre père, servait de boîte aux lettres.
A trois reprises notre père fut pris par les paras et torturé pour lui faire avouer la vérité sur Mahmoud, dont une fois au sinistre Casino de La Pointe Pescade.
Mustapha Guemati, sera arrêté, deux fois pendant cette période mais les dirigeants de la Zone ne bougeront pas tant était forte leur certitude qu’il ne parlerait pas. Mustapha ne parlera pas malgré des tortures indicibles.
Il venait de se marier.
Il sera condamné à mort.
Dans cette maison l’héroïsme était une affaire d’exception autant que de quotidien.
Une matinée du printemps 1957, les parachutistes qui recherchaient Azzedine le cadet de Mustapha entré lui aussi en clandestinité, ont torturé, dans la cour même de la maison, notre tante Baya devant des usagers du marché de Djamââ Lihoud (la Synagogue) ramenés de force. Les paras la frappèrent des heures jusqu’à la faire vomir du sang.
Nous ne comptons pas les jours pendant lesquels les parachutistes, (y compris les plus hauts gradés, Massu, Bigeard, Godard) ont envahi la maison pour nous faire avouer, adultes et enfants, la « cache » des fellaghas. Nous tous rassemblés tremblions de peur que quelqu’un d’entre nous cède et parle.
Quand Mahmoud a dû entrer en clandestinité totale, le plus dur pour nos parents a été, sur ordre de la Zone, de couvrir la planque en disant que Mahmoud avait disparu, sans jamais revenir, pour avoir volé une grosse somme à son père.
Les liens qui nous lient à Ali, Hassiba ou petit Omar, sont aussi puissants que ceux qui nous lient à Mahmoud.
Après l’arrestation de Zohra Drif et de Yacef sadi, notre mère a été au cœur de la dernière bataille. Elle a coupé et jeté dans les toilettes, le plastic comme demandé par Ali. Elle a caché l’argent considérable de la Zone Autonome. Elle a été confrontée à Yacef Sadi, notamment sur la question de l’argent de la Zone Autonome.
Chaque 8 octobre, nous avons eu mal de voir notre frère oublié. Nous connaissions quelques raisons de cet oubli mais longtemps nous avons pensé que l’histoire réelle, la grandeur de la lutte et de la cause, étaient plus grande que les petites falsifications de l’histoire.
Il n’était pas question pour nous de porter atteinte à la beauté et à la grandeur de notre guerre de libération, même au détriment de notre frère. Ali, Hassiba, Petit Omar, Mahmoud auraient-ils accepté qu’on verse dans le dénigrement de notre combat à cause de quelques survivants ?
Mais les derniers développements ajoutent de nouvelles blessures et ne nous permettent plus de considérer cet oubli de Mahmoud comme une faute morale de quelques anciens militants ou quelques médias.
Il est anormal que Zohra Drif, déclare ne pas connaître Mahmoud Bouhamidi, l’adolescent qui a partagé la cache qui l’a protégée et avec qui elle a habité près de deux ans cette fameuse maison du 4 rue Caton. Et dont la mère s’est occupée de ses plus simples besoins. Il était et il est impossible qu’on survive dans la clandestinité, et surtout celle imposée par notre guerre, sans connaître le moindre détail sur la vie des gens qui nous hébergent, adultes, ados ou enfants. Et Mahmoud était un militant de longue date puis un élément clé dans le fonctionnement des communications de l’État-Major de la Zone Autonome. Il connaissait presque toutes les adresses et nous le savons pour avoir porté tracts et messages vers certaines d’entre elles.
Il est anormal que le chef du gouvernement algérien inaugure un mémorial pour lequel on a élevé des statues à nos frères et sœur Ali, Hassiba et petit Omar et qu’on oublie Mahmoud. Comment toute la hiérarchie administrative et politique de l’Algérie peut-elle, à ce point, ignorer la vérité pour un acte de guerre aussi retentissant que celui du sacrifice de ces quatre héros qui ont respecté leur serment de ne jamais se rendre comme ont respecté ce serment les frères Ramel ? Nous ne sommes plus face à de petits calculs.
Il est encore plus anormal, que de algériens, bien intentionnés, mettent sous le nom de notre frère la photo de Badji Mokhtar, un autre illustre martyr.
Nous ne sommes plus face à de petits calculs mais à une véritable distorsion de l’histoire de notre combat.
Pour beaucoup de gens, l’oubli de Mahmoud Bouhamidi, correspond à des jeux de mémoire et de prestige qui servait à cacher quelque faiblesse ou quelque faute morale. Tant que cela restait à ce niveau, nous avons préféré respecter l’histoire de notre guerre de libération, dans sa grandeur et ses dimensions qui dépassent de loin ses acteurs et même ses dirigeants.
Mahmoud et ses trois compagnons martyrs appartiennent à cette grandeur. Nos parents appartiennent à cette grandeur d’avoir hébergé le Quartier Général de la Zone Autonome sans jamais parler, céder à la torture.
Mais notre mère et notre tante méritent une mention spéciale.
En respect de leur serment de mourir plutôt que de se faire arrêter, les quatre martyrs, ont donné leur vie, après les deux frères Ramel.
Que chacun mesure si le combat des héros avait la moindre chance de succès sans cet engagement populaire, anonyme mais total de notre famille et de bien d’autres.
Nous n’écrivons à aucune autorité mais nous t’écrivons cette lettre, à toi, cher peuple algérien, pour que tu saches qu’on veut amputer, jusque dans leur mort, Ali la pointe, Hassiba Ben Bouali et Petit Omar de leur frère Mahmoud Bouhamidi, frère dans la vie et le combat autant que dans la mort. Car c’est plus les martyrs qui sont trahis que nous, les sœurs ou les parents de Mahmoud.
Et nous nous engageons à rassembler les souvenirs de ces deux années où la maison Guemati a accueilli des êtres aussi exceptionnels que Hassiba, Ali et Petit Omar.
Honorez avec nous Mahmoud, Ali, Hassiba, petit Omar, dans ce qu’ils ont d’inséparable.
Honorons tous les martyrs.
Honorons la prière de Didouche Mourad : « Si nous venons à mourir, défendez nos mémoires. »
Gloire aux martyrs. A tous les martyrs.
Signé : Fadela et Ghania Bouhamidi. A Alger le Le 7 Octobre 2016
P.S : Notre père, aussi, est mort en martyr le 20 juin 1959, un mois après avoir reçu l’éclat d’une grenade lancée, par des terroristes de l’Algérie française à l’intérieur de son local commercial à Djamaa Lihoud.
Cette lettre a été proposée à plusieurs organes de presse.
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Bruno Guigue – Palestine : La conscience humaine demande des actes

Dans un monde où le ressassement médiatique tient lieu de preuve irréfutable, certains mots sont des mots-valises, dont l’usage codifié à l’avance est propice à toutes les manipulations. De perpétuels glissements de sens autorisant le passage insidieux d’un terme à l’autre, rien ne s’oppose à l’inversion maligne par laquelle le bourreau se fait victime, la victime se fait bourreau, et l’antisionisme devient un antisémitisme.
L’antisionisme a beau se définir comme l’opposition à une entreprise coloniale, l’admettre comme tel serait encore faire un compromis avec l’inacceptable. Empreint d’une causalité diabolique, l’antisionisme est moralement disqualifié, mis hors-jeu en vertu de l’anathème qui le frappe. On a beau rappeler que la Palestine n’est pas la propriété d’une ethnie ou d’une confession, que la résistance palestinienne n’a aucune connotation raciale, que le refus du sionisme est fondé sur le droit des peuples à l’autodétermination, ces arguments rationnels sont balayés par la doxa.
Depuis soixante-quinze ans, tout se passe comme si l’invisible remords de l’holocauste garantissait à l’entreprise sioniste une impunité absolue. Avec la création de l’État hébreu, l’Europe se délivrait miraculeusement de ses démons séculaires. Elle s’octroyait un exutoire au sentiment de culpabilité qui la rongeait pour ses turpitudes antisémites. Portant sur ses épaules la responsabilité du massacre des juifs, elle cherchait le moyen de se débarrasser à tout prix de ce fardeau.
L’aboutissement du projet sioniste lui offrit cette chance. En applaudissant à la création de l’État juif, l’Europe se lavait de ses fautes. Simultanément, elle offrait au sionisme l’opportunité d’achever la conquête de la Palestine. Ce rachat par procuration de la conscience européenne, Israël s’y prêta doublement. Il reporta d’abord sa violence vengeresse sur un peuple innocent de ses souffrances, puis il offrit à l’Occident les avantages d’une alliance dont il fut payé en retour.
L’un et l’autre liaient ainsi leur destin par un pacte néo-colonial. Le triomphe de l’État hébreu soulageait la conscience européenne, tout en lui procurant le spectacle narcissique d’une victoire sur les barbares. Unis pour le meilleur et pour le pire, ils s’accordaient mutuellement l’absolution sur le dos du monde arabe en lui transférant le poids des persécutions antisémites. En vertu d’une convention tacite, Israël pardonnait à l’Europe sa passivité face au génocide, et l’Europe lui laissait les mains libres en Palestine.
Son statut exorbitant du droit commun, Israël le doit à ce transfert de dette par lequel l’Occident s’est défaussé de ses responsabilités sur un tiers. Parce qu’il fut l’antidote au mal absolu, qu’il plongeait ses racines dans l’enfer des crimes nazis, Israël ne pouvait être que l’incarnation du bien. Mieux encore qu’une sacralité biblique aux références douteuses, c’est cette sacralité historique qui justifie l’immunité d’Israël dans la conscience européenne.
En y adhérant, les puissances occidentales l’inscrivaient dans l’ordre international. Avalisée par les puissances dominantes, la profession de foi sioniste devenait loi d’airain planétaire. L’invocation du sacré diabolisant son contraire, cette sacralité d’Israël vise à ôter toute légitimité aux oppositions qu’il suscite. Toujours suspecte, la réprobation d’Israël frôle la profanation. Contester l’entreprise sioniste est le blasphème par excellence, car c’est porter atteinte à ce qui est inviolable pour la conscience européenne.
C’est pourquoi le déni de légitimité morale opposé à l’antisionisme repose sur un postulat simplissime dont l’efficacité ne faiblit pas avec l’usage : l’antisionisme est un antisémitisme. Combattre Israël, ce serait, par essence, haïr les juifs, être animé du désir de rejouer la Shoah, rêver les yeux ouverts de réitérer l’holocauste.
Cette assimilation frauduleuse de l’antisémitisme et de l’antisionisme est une arme d’intimidation massive. Limitant drastiquement la liberté d’expression, elle tétanise toute pensée non conforme en l’inhibant à la source. Elle génère une autocensure qui, sur fond de culpabilité inconsciente, impose par intimidation, ou suggère par prudence, un mutisme de bon aloi sur les exactions israéliennes. Simultanément, cette assimilation mensongère vise à disqualifier moralement l’opposition politique à l’occupation sioniste.
La chaîne des assimilations abusives, en dernière instance, conduit à l’argument éculé qui constitue l’ultime ressort de la doxa : la «reductio ad hitlerum», la souillure morale par nazification symbolique, dernier degré d’une calomnie dont il reste toujours quelque chose. Terroriste parce qu’antisioniste, antisioniste parce qu’antisémite, la résistance à la terreur coloniale cumulerait ainsi les infamies.
Seule force qui ne cède pas devant les exigences de l’occupant, la résistance, pour prix de son courage, subit alors le tir croisé des accusations occidentales et des brutalités sionistes. Et comme si la supériorité militaire de l’occupant ne suffisait pas, il faut encore qu’il se targue d’une supériorité morale dont ses crimes coloniaux, pourtant, attestent l’inanité.
Ce que montre le génocide de Gaza, c’est la brutalité de l’occupant, sa morgue coloniale, son mépris pour la vie des autres, son aplomb dans le meurtre, sa lâcheté lorsqu’il assassine des civils. Mais c’est aussi cette mauvaise foi abyssale, cette hypocrisie de l’agresseur qui joue à l’agressé, ce mensonge qui sort de sa bouche lorsqu’il prétend se défendre, lorsqu’il condamne le terrorisme, lorsqu’il ose invoquer la légitime défense, lorsqu’il parle d’antisémitisme.
Les combattants palestiniens sont des résistants qui se battent pour la terre de leurs ancêtres, pour vivre en paix, un jour, dans cette Palestine dont l’envahisseur veut les spolier, pour cette Palestine dont l’État-colon se croit dépositaire, alors qu’il en est l’occupant illégitime. La légitime défense d’Israël ? Soyons sérieux : la seule légitime défense qui vaille, c’est celle du peuple palestinien, pas celle de la soldatesque coloniale ; celle de l’occupé qui résiste, pas celle de l’occupant qui opprime.
On nous raconte que l’affrontement actuel est dû à l’intransigeance des extrémistes des deux camps. Mais ce renvoi dos-à-dos de l’occupant et de l’occupé est une supercherie. Depuis quand la résistance est-elle extrémiste ? C’est l’occupation qui est extrémiste, avec sa violence de tous les instants, cette insupportable chape de plomb qui pèse sur un peuple meurtri, et dont les sursauts de révolte, heureusement, montrent qu’il n’est pas vaincu.
Cette guerre est le fruit de l’occupation et de la colonisation, et les Palestiniens ne sont pas responsables de l’injustice qu’on leur fait subir. Elle n’a pas commencé le 7 octobre 2023 : elle est née avec le projet sioniste et la dépossession du peuple palestinien. Et cette guerre n’est pas une guerre ordinaire, c’est la lutte entre une puissance occupante et une résistance armée, et il ne suffit pas d’appeler à la cessation des combats pour y mettre fin.
Ce qui est à la fois odieux et ridicule, dans les déclamations de la diplomatie occidentale et arabe, c’est cet appel au désarmement des Palestiniens qui revient désormais comme une ritournelle. Incapables d’intervenir contre la politique génocidaire du boucher de Tel-Aviv, ces lâches leur demandent de baisser les bras, de se résigner, d’accepter le joug, en feignant d’ignorer les raisons pour lesquelles les Palestiniens ne le feront pas, ni aujourd’hui ni demain.
Est-il si difficile de comprendre que la guerre entre la puissance occupante et la résistance armée durera aussi longtemps que durera l’occupation ? Ce n’est pas la partie palestinienne qui a enterré les «accords de paix», mais les gouvernements israéliens successifs.
On se souvient des envolées lyriques sur le «miracle de la paix» accompli en 1995 devant la Maison-Blanche par des leaders charismatiques couronnés du Prix Nobel. En dépit de cette réconciliation-spectacle, l’affrontement n’a jamais cessé. Et pour cause : issus des négociations secrètes menées à Oslo, les accords paraphés en 1993-1995 n’ont jamais eu pour ambition d’instaurer un État palestinien aux côtés de l’État d’Israël.
Présentés comme un «compromis historique» fondé sur des concessions mutuelles, ces accords étaient une supercherie. Yasser Arafat reconnaissait la légitimité de l’État d’Israël. Il approuvait les résolutions 242 et 338 de l’ONU, alors qu’elles ne mentionnent même pas les droits des Palestiniens. Il renonçait solennellement à la lutte armée. Mais Itzhak Rabin, lui, ne reconnaissait que la légitimité de l’OLP comme représentant du peuple palestinien, rien de plus.
Devant la Knesseth, en octobre 1995, le Premier ministre israélien précisa sa pensée : «Nous voulons une solution permanente avec un État d’Israël qui inclura la plus grande partie de la terre d’Israël de l’époque du mandat britannique et, à ses côtés, une entité palestinienne qui sera un foyer pour les résidents palestiniens de Cisjordanie et de Gaza. Nous voulons que cette entité soit moins qu’un État». Un État palestinien ? Trois mois avant son assassinat, Rabin indiquait clairement qu’il n’en voulait pas.
Les accords prévoyaient l’installation d’une «autorité intérimaire d’autonomie», et non l’exercice de l’autodétermination nationale palestinienne. Cette autorité intérimaire n’avait aucun des attributs de la souveraineté. Elle dépendait de financements internationaux, accordés au gré de sa coopération avec Israël. Elle n’avait ni force armée, ni diplomatie indépendante, ni assise territoriale, le morcellement de la Cisjordanie interdisant le contrôle d’un territoire homogène.
D’une perversité inouïe, le processus inversait la charge de la preuve au détriment des Palestiniens. Dans l’attente du règlement final, la direction de l’OLP fut sommée de fournir des gages de sa bonne foi. Désormais responsable de l’ordre public en Cisjordanie et à Gaza, elle avait le devoir de réprimer la moindre résistance à l’occupation
L’autorité intérimaire était donc une sorte de police indigène à qui l’occupant déléguait la tâche de maintenir l’ordre. L’instauration d’une véritable souveraineté palestinienne, en revanche, n’était nullement prévue par les accords. Le texte adopté prévoyait seulement un «arrangement permanent» qui serait fondé, au terme d’une période intérimaire de cinq ans, sur les résolutions 242 et 338 de l’ONU.
La perspective à long terme demeurait d’autant plus floue que, durant toutes les négociations, la position israélienne se résumait au quadruple «non» : refus de reconnaître la responsabilité sioniste dans le drame des réfugiés de 1948 et 1967 ; refus d’une restitution intégrale de Jérusalem-Est annexée ; refus du démantèlement des principales colonies juives implantées en Cisjordanie ; refus d’un tracé des frontières entre Israël et la Palestine épousant la «ligne verte» de 1967.
Fondées sur les résolutions onusiennes, ces exigences constituaient pour les Palestiniens la contrepartie légitime de leur renonciation à 78% de la Palestine mandataire. Mais pour Israël, ces 78% lui appartenaient de droit. Quant aux 22% restants, il les répartissait en deux morceaux. Non négociable, le premier était voué à demeurer sous souveraineté israélienne (Jérusalem-Est et les principales colonies). Le second (Gaza et la moitié de la Cisjordanie) serait confié à une autorité chargée d’administrer les zones à forte densité autochtone.
Aussitôt vantée par la propagande occidentale, la «générosité israélienne» lors des négociations de Camp David II en septembre 2000 consistait donc à concéder à l’OLP la minuscule bande de Gaza et la peau de léopard d’une Cisjordanie truffée de colonies, soit le dixième de la Palestine mandataire. En outre, la question de Jérusalem faisait l’objet d’une proposition infamante où Israël conservait une souveraineté usurpée sur la future capitale palestinienne.
La souveraineté du peuple palestinien sur sa terre historique n’était plus une exigence non négociable, mais un horizon incertain, livré au succès hypothétique d’un processus bancal. Faute d’une négociation immédiate en vue d’un règlement au fond, les accords d’Oslo (1993) et les négociations de Camp David II (2000) ont ainsi renvoyé l’instauration de la souveraineté palestinienne aux calendes grecques.
Pour Israël, le bénéfice de ces accords inégaux était colossal. Conformément au «plan Allon» présenté au lendemain de la victoire de 1967, l’occupant se retira des zones à forte densité de population arabe, puis il les enserra dans un vaste réseau de colonies reliées par des voies de contournement. Effaçant peu à peu les «frontières de 1967», la colonisation s’intensifia, gangrenant sans répit les territoires palestiniens : la politique du fait accompli allait prospérer comme jamais à l’abri du «processus de paix».
Bénéficiant d’un rapport de forces favorable, Israël, de 1993 à 2000, négocia d’une main et colonisa de l’autre. Il prétexta la moindre résistance pour renier ses engagements et accroître son emprise sur la totalité de la Palestine. Au nom de sa sacro-sainte sécurité, il frappa sans ménagement. En sapant l’assise territoriale du futur État palestinien, la colonisation anéantit l’enjeu même d’une négociation devenue un simple alibi. Bientôt, le nom d’Oslo n’évoqua plus qu’un grossier marché de dupes, et la direction de l’OLP parut avoir vendu la paix pour un plat de lentilles.
En attaquant Israël avec une audace inouïe, le 7 octobre 2023, le mouvement national palestinien a franchi un cap historique. Devant l’absence de solution politique et la violence de la répression israélienne, les combattants palestiniens ont mené une offensive en territoire ennemi. La guerre impitoyable que leur livre désormais l’occupant a ouvert une nouvelle séquence de la lutte de libération nationale, marquée par le déchaînement d’une politique génocidaire et la perspective d’une expulsion massive, mais aussi par l’incroyable résistance et la détermination farouche du mouvement national palestinien.
Ces atrocités témoignent d’une fuite en avant de la puissance occupante, incapable de vaincre militairement une résistance qui ne plie pas le genou, malgré les sacrifices de ses militants et les horreurs infligées aux femmes et aux enfants martyrs de Palestine. Révulsé, le monde assiste depuis deux ans au massacre quotidien de populations civiles par un État qui sombre dans la folie meurtrière, joignant au crime de masse l’abjection qui consiste à stigmatiser ses victimes.
Scandée par l’invocation grotesque de prophéties apocalyptiques, cette violence bénéficie d’une impunité de fait qui, au-delà des condamnations quasi unanimes, interroge en profondeur la conscience humaine. Car il y a des situations face auxquelles les imprécations morales ne suffisent plus : il faut prendre concrètement ses responsabilités et agir résolument par tous les canaux dont on dispose, et non pas se contenter d’une réprobation sans conséquence ou d’une indignation sans effet.
Aussi le rappel lancinant de «la solution à deux États», ce mantra des représentations diplomatiques, semble-t-il doublement dérisoire : par son impuissance immédiate à arrêter le massacre, et par son impossibilité à entrer dans les faits depuis trente ans en raison d’une obstruction qui tient à la nature même du projet sioniste. L’intention est peut-être louable, mais dans l’histoire on n’a jamais mis fin au colonialisme avec des intentions. Invoquer cette solution comme si elle était viable, c’est nourrir une illusion qui fut déjà entretenue jadis, et qui a laissé beaucoup d’amertume en se dissipant bien vite.
source : Bruno Guigue
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الطاهر المعز – بعض الملاحظات عن فلسطين منتصف سنة 2025

بعض الملاحظات عن فلسطين منتصف سنة 2025 : الطاهر المعز
الإعلام وصورة الفلسطيني الذي يموت جوعًا
تَبُثّ شبكة الجزيرة والعديد من الشبكات الناطقة بالعربية ساعات من مشاهد البؤس والمعاناة والمجاعة في غزة التي يمكن تلخيصها في بضع دقائق وما هذا التّمطيط لمشاهد الفقراء المُحاصَرين الذين يموتون جوعًا سوى تحويل المأساة ( الناتجة عن الإستعمار الإستيطاني) إلى روتين، وتكمن الأهداف الحقيقية وراء هذا التركيز على البؤس في الدّعوة إلى القبول بواقع الأمر الإستعماري الإستيطاني وكأن الجوع والبؤس والإبادة هي نتيجة للمقاومة، أو نتيجة رفض الأمر الواقع والسّعي لتغييره، واستخدام مشاهد البؤس ومعاناة الفقراء والجوع كموضوع استهلاك يومي أمام شاشة التلفزيون ( وهو فِعْل سلبي) بدل التظاهر في الشوارع وأمام السفارات والمراكز الثقافية ومؤسسات الدّول الإمبريالية الدّاعمة للعدوان الصهيوني، وتُستخدم هذه المشاهد المُطَوّلة في أحسن الحالات لاستدرار عطف « المُحْسِنِين » بدل الدّعوة إلى رفْض الظُّلْم، والتّوعية بقضايا الإنسانية بأسباب الظلم ولمواجهة الإستغلال والإضطهاد والظّلم والإستعمار والفقر والجوع، لأن لوسائل الإعلام دور هام في التوعية بالسياق المحلي والدّولي للأحداث ( العدوان الصهيوني في حالة غزة) وضرورة ملاحقة ومُساءلة العدو وكذلك الأنظمة العربية المتواطئة، وفي مقدّمتها مشيخة قَطر مالكة شبكة « الجزيرة » التي حوّلت مُعاناة الشعب الفلسطيني إلى موضوع استهلاك إعلامي، ليعيش النّاس في حالة رُعب من فكرة المقاومة …
ارتفعت حدّة الإحتجاجات في الدّول الرأسمالية، وسط مشاهد الجوع وقتل الأطفال الذين يحاولون الحصول على بعض المواد الغذائية، بأسلحة أوروبية وأمريكية، وتوسّعت حركة المقاطعة وأصبح المواطنون الأوروبيون والأمريكيون يردّدون شعار « من النهر إلى البحر » خلال المظاهرات، وسمح العدوان الحالي وما رافقه من ممارسات همجية بإعادة النّظر في ما تعلّمه الشباب في المنهاج الدّراسية، وبنقد « دولة إسرائيل » وليس فقط حكومتها الحالية.
استهداف الصحافيين
دَمّر الكيان الصهيوني المدارس والمستشفيات والمحلات السكنية والتجارية خلال الأشهر التي تلت السابع من تشرين الأول/اكتوبر 2023، وتم استهداف الصحافيين الذين يُوثّقون مجريات العدوان والمُسعفين الذين يحاولون إنقاذ حياة المُصابين، ويفوق عدد الصحفيين الذين قُتلوا في غزة خلال ثمانية عشر شهرًا عدد الذين قُتلوا في الحرب الأهلية الأمريكية والحربَيْن العالمِيّتَيْن الأولى والثانية وحروب كوريا وفيتنام وأفغانستان مجتمعة ( وجميعها عدوانات أمريكية) في محاولة لإلغاء شهادات من يحاولون نَقْلَ ما يحدث لشعب محاصر تحت نيران القصف المتواصل، ومن دلائل الإستهداف المُتعمّد إن العديد من الصحافيين الفلسطينيين قُتلوا في منازلهم، مع عائلاتهم، لأن وجود الصحفيين شاهد على واقع الإبادة والوحشية الذي يعاني منه الشعب الفلسطيني منذ بداية الإرهاب الصهيوني في فلسطين، خلال عشرينيات القرن العشرين، مما اضطر منظمات مثل « مراسلون بلا حدود » و »لجنة حماية الصحفيين » لإصدار بيانات تُندّد بالغارات على مَرْكَبَات ومكاتب ومنازل صحفية تحمل علامات واضحة، مما يُشير إلى أن الهجمات لم تكن عشوائية، بل كانت جزءًا من استراتيجية أوسع لإسكات أصوات الإعلام الفلسطيني، ولِقَتْل الشهود، وفق لجنة حماية الصحافيين، مما يجعل العدوان يطال ذاكرة وسرديات ورواية الفلسطينيين، وفق موقع ( Modern times review ) 15 تموز/يوليو 2025
في هذا المناخ أعلن بعض رؤساء حكومات أوروبا الذين لم يدافعوا عن مواطنيهم الذين اعتقلهم الإحتلال خلال محاولة كسر حصار غزة، اعتزامهم « الإعتراف بدولة فلسطين » الوهمية، شرط نزع سلاح المقاومة ( وتعزيز سلاح العدو) وشرط عدم مشاركة بعض الفصائل الفلسطينية في أي جهاز سلطة وهمية وما إلى ذلك من الشروط المنافية لأي شكل من أشكال السيادة التي لن تتحقق في ظل الإحتلال ( ولو بانتخابات « ديمقراطية »)، وما الحديث عن الإعتراف بدولة فلسطينية سوى محاولة نسف فكرة التّحرير ( تحرير الأرض والإنسان)، لأننا في مرحلة تحرير وطني، وليس في مرحلة بناء الدّولة، ويقتضي المنطق السليم تحرير الأرض، قبل الحديث عن الدّولة…
يستخدم العدو الصهيوني، كما كل الرأسماليين والإستعماريين مصادرة الممتلكات والإستغلال والإضطهاد والإفقار والتجويع كأدوات هيمنة مما يُعزّز مكانة الرأسماليين (والمُستوطنين في الحالة الفلسطينية ) الذين يستفيدون من الجهاز العسكري ( الشرطة والدّرك والجيش ) لإخضاع المُستغَلِّين والمُستعْمَرِين، مما يتطلّب التفكير في الحلول الحقيقية ( الجِذْرِية) لمقاومة « السلام بالقوة » الذي تحاول الإمبريالية الأمريكية والكيان الصهيوني والأنظمة العربية فَرْضَهُ للسيطرة على الأرض والموارد وإعادة تشكيل العالم من خلال القوة العسكرية كوسيلة كوسيلة لتحقيق هذه الأهداف، وما فعل المقاومة سوى ردّ على الهيمنة واستغلال الموارد الطبيعية والبشرية من قِبَل رأس المال والإمبريالية التي تستخدم القوة الإقتصادية أو الإعلامية أو العسكرية لتعظيم أرباحها، والمقاومة نقيض الإستسلام وقُبُول شُرُوط المُسْتَغِلّ والمُسْتَعْمِر ورفض لطَمْس الهوية التاريخية والثقافية للشعوب المُسْتَعْمَرَة…
اليمن – دعم الشعب الفلسطيني
بدأت المقاومة اليمينة محاصرة الكيان الصهيوني في البحر الأحمر منذ بداية العدوان الحالي، وأعلن متحدث باسمها يوم 12 كانون الأول/ديسمبر 2023، عن « فرض حصار بحري وحظر مرور جميع السفن المتجهة إلى الكيان الصهيوني، بغض النظر عن جنسيتها، ما لم تُلبَّ احتياجات قطاع غزة من الغذاء والدواء والصحة، وستصبح هذه السفن أهدافًا مشروعة لقواتنا المسلحة اليَمَنِيّة في البحر الأحمر وبحر العرب، مع ضمان استمرارية الملاحة التجارية عبر البحر الأحمر وبحر العرب لجميع السفن والدول » باستثناء تلك المرتبطة بالصهاينة أو التي تنقل البضائع إلى موانئ فلسطين المحتلة، وبالفعل منعت المقاومة عدة سفن من المرور في البحر الأحمر، وقصفت المقاومة سفينة « ستريندا » التجارية التي ترفع العلم النرويجي قبالة سواحل اليمن، كانت تنقل النفط إلى العدو وتجاهلت نداء التحذير، وتعرضت سفينة حربية أمريكية وأربع سفن تجارية على الأقل لهجوم صاروخي أو بطائرات مسيرة فضلا عن احتجاز السفينة « غالاكسي ليدر »، وتعرضت سُفُن بريطانيا إلى أكبر عدد من الهجوم، فردّت بتعزيز وجودها العسكري في المنطقة، بنشر السفينة الحربية « إتش إم إس دايموند »، التي ستنضم إلى السفينة الحربية « إتش إم إس لانكستر »….
استمرّت المقاومة اليمنية، وتمكنت يوم التاسع من أيار/مايو 2025 من اختراق طبقات متعددة من منظومات الدفاع الجوي الصهيوني، لقصف مطار اللّد مما أدّى إلى تعليق الرحلات الجوية، فضلا عن إغلاق ميناء أم الرّشراش، وفشلت الولايات المتحدة وبريطانيا والكيان الصهيوني وفرنسا وألمانيا وجيوش دول أخرى من إنهاء الحصار على البحر الأحمر، باستخدام القوة، وردّت المقاومة بالإنتقال إلى مرحلة جديدة من المواجهة، بنهاية شهر تموز/يوليو 2025، بتشديد الحصار البحري، في خطوة نوعية واستراتيجية « دفاعا عن الشعب الفلسطيني في مواجهة الإبادة والعدوان على غزة » ردًا على استخدام المجاعة كسلاح…
علّق عبد الملك الحوثي، في بيان نُشِرَ يوم الأول من آب/أغسطس 2025: « إن أعداد الفلسطينيين الذين يقتلهم الجوع في تزايد يومي، وأن الواقع أقسى وأخطر بكثير مما تشير إليه الأرقام المعلنة، وما إسقاط المساعدات جوًا سوى حيلة جديدة للعدو، إذ تم إلقاء معظم المساعدات في مناطق خطيرة حيث يُقتل الفلسطينيون لمجرد ذهابهم إليها. أما عن إعلان الاعتراف المرتقب والمشروط بالدولة الفلسطينية فيعلق قائلا: تدّعي لندن رغبتها في الاعتراف بالدولة الفلسطينية، لكنها تُقدّم الأسلحة وجميع أنواع الدعم، كما تُقدّم فرنسا وألمانيا دعمهما الكامل للعدو… إن الرؤية الغربية للدولة الفلسطينية ليست سوى كيان على جزء صغير من الأرض الفلسطينية، مجرد من السلاح، وتفتقر إلى أي أساس دولة حقيقي، ومن غير المجدي الاعتماد على المؤسسات الدولية والأمم المتحدة، التي لم تقدم شيئًا للشعب الفلسطيني منذ إنشائها.
حلّ الدولتين المَغْشُوش
وسيلة مُقنّعة لإلغاء حق العودة وتحرير فلسطين
أعلن الرئيس الفرنسي إيمانويل ماكرون إنه سيعترف بدولة فلسطين، بعد أيّام من رفض مراجعة اتفاقية الشراكة الأوروبية الصهيونية ورفض حظر شامل على الأسلحة والسلع والتعاون الأكاديمي ( الذي يستفيد منه الجيش الصهيوني)، والتزمت النقابات والقوى المحسوبة على اليسار الصمت التام بشأن الشروط التي وضعها ماكرون لهذا الاعتراف، ومن أهمّها نزع سلاح حماس وحَظْر مشاركتها في أي مؤسسة فلسطينية ولو انتخبها الفلسطينيون، ثم أعلن الرئيس الفرنسي إلقاء الطائرات العسكرية أربعين طنّا من المساعدات الإنسانية، أي حمولة شاحنَتَيْن فيما يرفض الضغط على الكيان الصهيوني لفتح المعابر لحوالي ألف شاحنة تنتظر على معابر رفح وكرم أبو سالم…
إن مطلب « الاعتراف بدولة فلسطين » لا يُعتبر التزامًا بتغيير شيئ في الوضع الراهن للفلسطينيين، خاصةً إذا لم تصاحبه عقوبات ضدّ الكيان الصهيوني أو على الأقل تطبيق قرارات محكمة العدل ومحكمة الجنايات الدّولية، ومنع القادة الصهاينة من من دخول أراضي بلدان الإتحاد الأوروبي وبريطانيا، وفي المُقابل يُعتبر « حل الدّولتيْن » تقويضًا للتّحرّر الوطني وقبول » السلام الاستعماري »، ونزع سلاح المقاومة الوطنية الفلسطينية، وخدمة مصالح الإمبريالية الغربية بالحفاظ علىمصالحها ووُكَلائها في الشرق الأوسطية الفرنسية « جان نويل بارو » واضحا ومتعجرفا يعكس صُورَة الإستعماري التّقليدي، وذلك خلال مقابلة أجرتها معه صحيفة « لا تريبيون » الصادرة بتاريخ 28 تموز/يوليو 2025، وصرّحَ: « يجب نزع سلاح حماس واستبعادها نهائيًا من أي جهاز سلطة أو حُكْم في غزة وفلسطين ويجب إجراء إصلاحات جذرية للسلطة الفلسطينية، ويجب على الدول العربية تطبيع علاقاتها مع إسرائيل » .
لا تعترف السلطة الفرنسية (وأمثالها في الإتحاد الأوروبي أو أمريكا الشمالية) ممثلة في الرئيس ووزير الخارجية، بحق الشعوب في تقرير مصيرها، ويُقدّم ممثلو السلطة الفرنسية خطة امبريالية أسوأ من أوسلو، مع « دولة فلسطين » تحت سيطرة الإمبرياليين الغربيين مع فَرْض التطبيع القسري…
أعلن وزير الخارجية الفرنسي في خطابه بالأمم المتحدة يوم 28 تموز/يوليو 2025: » تعتبر فرنسا إن البديل الوحيد لدوامة العنف التي لا تنتهي هو إمكانية وجود دولتين واحدة للإسرائيليين وأخرى للفلسطينيين، تعيشان جنبًا إلى جنب في سلام وأمن »، في محاولة لإنقاذ الدولة الصهيونية الاستعمارية من جرائم الإبادة، فضلا عن استحالة أي حرية وأي استقلال مع بقاء الدّولة والحركة الصّهيونية التي تدعمها القوى الإمبريالية مُذْ كانت مشروعًا وأضفَت عليها « الشرعية الدّولية » سنة 1948 بدعم الإتحاد السوفييتي، من خلال قرار التقسيم سيء الذّكر.
إن قرارات الأمم المتحدة و »حل الدولتين » يعني وجود دولة وهْمِيّة محصورة في « الأراضي المحتلة » سنة 1967 التي يدمّرها حاليا الجيش الصهيوني، سواء في غزة أو الضفة الغربية. أما القُدس فاعتبرها الكيان الصهيوني « عاصمةً أبَدِيّةً » له بتشجيع من الإمبريالية الأمريكية وبعض دول الإتحاد الأوروبي، ويكمن وراء هذا الحل الزائف إنقاذ الكيان الصهيوني من الرأي العام الأوروبي والأمريكي الذي أصبح يُشكّك في شرعية وجود الكيان الصهيوني
إن هذه العملية برمتها، التي تدور حول ما يُسمى بالاعتراف بدولة فلسطين، هي مهزلة أو خدعةٌ كبرى، تهدف إلى الترويج لحلٍّ زائفٍ وغير قابل للتطبيق، والمشروط بالتخلي عن حق عودة اللاجئين الفلسطينيين ( رغم وجود القرار 194 للأمم المتحدة) وعن مشروع تحرير فلسطين وهو مشروط كذلك بنزع سلاح المقاومة، ولذا وجب التّأكيد بوضوح أن لا حلّ إلاّ بزوال الكيان الصهيوني، ولن يتم ذلك – كما لم يتم تحرير أي بلد في العالم – بدون مقارعة القوة بالقوة والسلاح بالسلاح ومقاومة العنف الإستعماري بالعنف الشعبي، فالشعوب لا تختار العُنف وإنما يَفْرِضُهُ عُنْف الإستعمار.
خاتمة
أظْهرت هذه الحلقة من العدوان ( منذ تشرين الأول/اكتوبر 2023 ) بوضوح الدّعم الإمبريالي المُطلق للكيان الصهيوني، عسكريا واقتصاديا ودبلوماسيا وإعلاميا وعقائديًّا ( بمعنى اعتبار فلسطين أرض اليهود، كما تدّعي العقيدة الصهيونية)، ولولا هذه الدّعم لما تمتّع الكيان الصّهيوني بحصانة كاملة مكّنته من الإستمرار في تصميم وتنفيذ عمليات الإبادة المُستمرة منذ 1948، أي منذ سنة إعلان تأسيس هذه المستوطنة والإعتراف بها كدولة عضو بالأمم المتحدة، شرْطَ عودة اللاجئين، غير إن الإعتراف تَمّ والشّرط لم يُنْجَزْ، وعجزت الأمم المتحدة، بحكم ظروف تأسيسها وطريقة عملها وحُدُود سُلْطَتِها وبحكم موازين القوى الدّولية، عن إلزام الكيان الصهيوني بتنفيذ أكثر من ثلاثة وثلاثين قرار أُمَمِي مُلْزم، وعن فَرْض العقوبات، وعن تطبيق قرارات أجهزة القضاء الدّولي ( محكمة العدل الدّوْلية والمحكمة الجنائية الدّولية )، بل اتخذ الكيان الصهيوني قرار طرد الأمين العام للأمم المتحدة، وفَرَضَ الحليف – بل الوَصِيّ أو العُرّاب – الأمريكي عُقوبات على موظفين سامين بالأمم المتحدة، ومن بينهم المُقرّرة الخاصة بالأراضي الفلسطينية فرانشيسكا ألبانيزي…
خدعت قيادةُ حركة فتح – بتواطؤ من قيادة الجبهة الدّيمقراطية – ومنظمة ُالتحرير الشّعبَ الفلسطينيَّ وأنصارَه، بإصرارها على ضرورة الحوار مع « اليسار » الصهيوني، حتى في ذروة غزو لبنان وحصار بيروت وتخريب مركز الدّراسات الفلسطينية ومجمل المؤسسات الفلسطينية في لبنان، غير إن حقيقة المجتمع الصهيوني ( مجتمع المستوطنين) برمّته ( باستثناء بعض الأفراد، والشّاد يُحْفَظُ ولا يُقاس عليه ) ظهرت خلال العدوان المكثف والمطول والإبادة في غزة – إن كان لا بُدّ من محاولة إثبات ذلك – فهذا المجتمع يَعِي إن وُجُودَه في فلسطين مرتبط بإبادة السّكّان الأصليين ( كما حدث في أمريكا وأستراليا ونيوزيلندا) ولذلك يدعم الإبادة الجماعية ويدعم تهجير الناجين من المذابح خارج وطنهم، ويدرك المستوطنون الصهاينة إن قُوّتهم العسكرية مُستَمدّة مباشرة من قُوّة الإمبريالية الأمريكية والأوروبية، مما يضمن لقادتهم السياسيين وضبّاط الجيش الحصانة والمناعة والإفلات من المحاسبة والعقاب…
لولا عمالة الأنظمة العربية للإمبريالية لما تمكّن الكيان الصهيوني من الإستمرار في الإحتلال ومن التّوسّع بل ومن الهيمنة، بواسطة القُوّة وكذلك بواسطة التّطبيع المُهين، على الوطن العربي برمّته، من المغرب إلى الخليج، ولذا وجب اعتبار الإمبريالية والصهيونية والأنظمة العربية شُركاء في احتلال فلسطين وفي إبادة شعبها، وفي الإعتداء على شعوب البلدان المجاورة لفلسطين، خصوصًا لبنان وسوريا، بل شركاء كذلك في العدوان الصهيوني على العراق وعلى تونس والسودان وليبيا واليمن ووصل حتى إيران، وبالتّالي لا بُدّ من النّضال ضدّ هذا الثّالوث، واعتبار قضية تحرير فلسطين شأنًا عربيا وأُمَمِيًّا…
الطاهر المعز
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Muḥ Muhubi- 𝟑𝟎𝟎 𝐠𝐫𝐚𝐦𝐦𝐞𝐬 𝐝𝐞 𝐫𝐢𝐳 (Ghaza)

𝟑𝟎𝟎 𝐠𝐫𝐚𝐦𝐦𝐞𝐬 𝐝𝐞 𝐫𝐢𝐳 par Muh Mouhoubi
𝟑𝟎𝟎 𝐠𝐫𝐚𝐦𝐦𝐞𝐬
Il avait sept ans.
Sept ans.
Et les yeux comme deux lunes crevées.
Dans le camp, la mère crache des mouches,
la sœur, trois ans, pisse la faim.
Et lui, le petit prophète aux pieds nus,
marche dans les décombres comme Moïse en sens inverse.
Vers rien.
Vers un peu de riz.
Il avance entre les rats, les gravats, les tanks à l’arrêt.
Les drones bourdonnent au-dessus de sa tête comme des guêpes bibliques.
Il cherche Dieu.
Ou juste quelque chose à mâcher.
Et là —
Le checkpoint.
L’escadron des élus.
Casques brillants, yeux morts,
dents blanches derrière des ordres.
L’un d’eux lui jette — jette ! —
un sachet de riz.
300 grammes.
Ni bénédiction, ni regard.
Mais le petit, lui,
ramasse la ration comme un prêtre ramasserait l’hostie tombée.
Il s’approche.
Et dans un geste immense — immense ! —
il embrasse la main du soldat.
Un baiser.
Un baiser à la main qui a rasé sa rue,
détruit son école,
explosé ses cousins,
et pissé sur les ruines.
Puis il se retourne.
Il court, ou tente.
Le riz contre le ventre, la lumière dans les yeux.
Et là :
PAN.
Une balle dans le dos.
Comme on écrase une blatte dans sa salle de bain.
Sans émotion.
Sans hésiter.
Parce que c’est un cafard.
Parce que ce gosse n’est pas de la lignée.
Parce qu’il est né sur la mauvaise terre,
dans le mauvais camp,
avec le mauvais sang.
Et le riz se renverse.
Éclate.
Rougit.
Les grains collent à la terre, comme des dents arrachées.
Et son corps, tout petit,
reste là, plié comme une prière jamais dite.
Le soldat, lui, range son arme.
Il a la conscience tranquille.
Il est du peuple élu.
Son père était tailleur à Varsovie,
son grand-père boucher à Budapest,
et Dieu, parait-il,
leur a promis cette terre dans un contrat signé à l’ombre d’un buisson ardent.
Alors l’enfant ?
Un obstacle.
Une souillure sur le plan divin.
Un indigène.
Un reste.
Une offrande.
Holocauste, disent-ils, ça veut dire offrande par le feu.
Alors ils offrent.
Encore.
Et encore.
Et Gaza brûle.
Je ne veux plus entendre vos versets.
Je ne veux plus voir vos pierres noires, vos murs pleurés, vos larmes scénarisées.
Un enfant a dit merci avant de mourir.
Et vous avez répondu avec une balle.
Et un silence.
Je vous accuse.
Je vous vomis.
Je vous maudis.
Vous avez pris le Nom,
et vous en avez fait une marque déposée,
un passe-droit pour le meurtre,
un tampon divin sur des missiles.
Vous avez fait de Yahvé un banquier militaire.
D’Abraham un colon.
De Moïse un chef de guerre.
Mais l’enfant,
lui,
était prophète.
Petit prophète de rien,
avec 300 grammes de riz,
un baiser au bout des doigts,
et une balle dans le dos comme testament.
Et son sang, lui,
crie plus fort que toutes vos prières.
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الطاهر المعز-مراسلون بلا حدود، نموذج من المنظمات غير الحكومية المُرتزقة

مراسلون بلا حدود، نموذج من المنظمات غير الحكومية المُرتزقة : الطاهر المعز
توطئة
من يفتقر إلى التّمويل الذّاتي يلجأ إلى التمويل الخارجي المَشْرُوط، ويُؤدّي حَجْب التّمويل إلى اختفاء المنظمات والجمعيات ووسائل الإعلام وما إلى ذلك، ويمول الاتحاد الأوروبي شبكة دعائية ضخمة ( بقيمة 650 مليون يورو سنويا) متشكلة من مكاتب الإستشارات ووكالات الصحافة وشركات الإعلانات ووسائل الإعلام السائدة ( مينستريم) والمستقلة والمنظمات غير الحكومية، فضلا عن وكالات رسمية وعن إنفاق الدّول الأعضاء، واستفادت الشركات الإعلامية العابرة للقارات مثل هافاس أو بوبليسيس بعقود ضخمة، خصوصًا قُبيل الإنتخابات الأوروبية فقد وقّعت شركة هافاس التي يمتلكها الملياردير اليميني المتطرف « بولوريه »، عقدا بقيمة 123,8 مليون دولارا سنة 2024…
نموذج « مراسلون بلا حدود »
تستفيد المنظمة غير الحكومية « مراسلون بلا حدود » من مِنح الإتحاد الأوروبي ومن فرنسا ( بلد المُؤسّسين المرتبطين باليمين المتطرف مثل روبرت مينارد، رئيس بلدية بيزييه حاليا) ومن بلدان عديدة مثل تايوان وكوريا الجنوبية والأنظمة الدّكتاتورية في أمريكا الجنوبية ( كولومبيا قبل التّغيير وبيرو…) ومن الوكالة الأمريكية للتنمية الدولية (التي يشرف عليها الرئيس الأمريكي ووزارة الخارجية ومجلس الأمن القومي ووكالة المخابرات المركزية) والصندوق الوطني للديمقراطية (NED) ومؤسسةة « المجتمع المفتوح » (جورج سوروس )، وفق ما نشرته منظمة « مراسلون بلا حدود » بشأن ميزانية 2024.
نشَرَ ماكسيم فيفاس سنة 2007 كتابًا ( 250 صفحة) بعنوان » الوجه الخفي لمراسلين بلا حدود: من وكالة المخابرات المركزية إلى صقور البنتاغون » ويُشير الكتاب إلى « العلاقات المشبوهة والتمويل المخزي والإحتجاج الإنتقائي على قمع حرية الصحافة وعلى الرقابة… » ويوضح الكتاب ضراوة الهجمات التي تشنّها منظمة مراسلون بلا حدود ضد الدول الفقيرة التي يريد « الغرب » إخضاعها، وصمتها ( أو اللّيونة والتّساهل) بشأن الجيش الأميركي والصهيوني، بسبب التّمويل السّخي من الوكالة الأمريكية للتنمية الدولية ومؤسسة المجتمع المفتوح ونيد ( NED ) و ( CFC ) وغيرها من الوكالات والمنظمات الأمريكية، وواجهات وكالة المخابرات المركزية الأمريكية التي تتدخل في الشؤون الدّاخلية للبلدان التي يُمكن فيها إنشاء حكومات موالية للولايات المتحدة، مما يجعل من منظمة مراسلون بلا حدود ذراعًا إعلاميةً أوروبيةً لوكالة المخابرات المركزية، باسم الدّفاع عن الدّيمقراطية والتّعدّدية وحرية الإعلام والنّشر، ودَرَس الكاتب ألفَ منشور وبيان للمنظمة ولم يجد منشورًا واحدًا ينتقد قمع الحرّيات في الولايات المتحدة والرعاة التقليديين الرئيسيين لمنظمة مراسلون بلا حدود، أو نقدًا للسياسة الإعلامية الفرنسية ( بلد المَنْشأ لهذه المنظمة) رغم انخفاض ثقة المواطنين في وسائل الإعلام في الفرنسية إلى 29% فقط – وهي واحدة من أدنى المعدلات في البلدان الـ 48 التي درستها رويترز(المصدر: تقرير رويترز 2025)
عَيّنات من التّواطؤ والصمت المُريب
رفضت منظمة مراسلون بلا حدود الدّفاع عن حرية الرأي – رغم النّداء الذي وجّهَهُ عشرات الصحافيين الأوكرانيين –عندما حظر نظام أوكرانيا بقيادة فولوديمير زيلينسكي ( قبل انطلاق الحرب) ثلاث قنوات تلفزيونية من أكثر القنوات شعبية في أوكرانيا لأنها رفضت الخضوع للسلطة الفاسدة المتحالفة مع مليشيات اليمين المتطرف ورفضت التّحوّل إلى أدوات للدعاية الحكومية، واختارت منظمة مراسلين بلا حدود « الأمان » من خلال الصّمت، كما صمتت المنظمة بشأن اعتقال الصحافي الأمريكي ( أصيل تشيلي ) غونزالو ليرا ، المقيم في خاركوف منذ سنة 2016، والذي حاول الكشف للجمهور الغربي عن بعض جرائم النظام الأوكراني، فتم اعتقاله وتعذيبه مرة أولى خلال شهر أيار/مايو 2023، ثم أُطْلِقَ سراحه بكفالة ووضعه في الإقامة الجبرية، ولما حاول الفرار تم اعتقاله على الحدود المجَرِية ( يوم 31 تموز/يوليو 2023 ) وتوفي في السجن عن عمر يناهز 55 عامًا، يوم 11 كانون الثاني/يناير 2024، بعد إصابته بالتهاب رئوي، ورفضت إدارة السجن تقديم الرعاية الطبية، وهو ما يُعدّ جريمة قتل متعمّد، ورفضت حكومة جوزيف بايدن طلب إيضاحات عن الاحتجاز غير القانوني لأحد مواطنيها ووفاته في السجن، كما رفضت منظمة مراسلين بلا حدود نشْر أي إعلام بالواقعة أو أي احتجاج، بل أكدت: « إن حرية الصحافة في أوكرانيا تتمتع بحماية أفضل من تلك الموجودة في كوريا الجنوبية والمجر واليونان واليابان… ». ( مؤشر حرية الصحافة العالمي لسنة 2025 ) لأن المسؤولين عن المنظمة يريدون الحفاظ على مصادر التمويل والرواتب المرتفعة والرحلات والإقامة المجانية في مختلف أنحاء العالم، أي الوكالة الأمريكية للتنمية الدولية والصندوق القومي الأمريكي للديمقراطية، ومنظمة « المجتمع المفتوح » لجورج سوروس…
تعتبر منظمة مراسلون بلا حدود « إن وجود وسائل إعلام حكومية ممولة من الميزانية الوطنية يمثل مشكلة خطيرة فيما يتعلق بحرية الصحافة »، وبالتالي يخفض ترتيب الدولة التي توجد فيها مثل هذه وسائل الإعلام في تصنيفها في « مؤشر حرية الصحافة العالمي » الذي تُصْدِرُهُ كل سنة، وتدعم وسائل الإعلام الخاصة المملوكة لقلة من الأثرياء الذين لا يسمحون بنشر أي معلومات تتعارض مع مصالحهم، ولا تذكر منظمة مراسلون بلا حدود إن وسائل الإعلام المملوكة للشركات والأثرياء ممولة من المال العام (أكثر من 100 مليون يورو سنويًا في فرنسا وحدها)، كما يتم تمويل العديد من وسائل الإعلام في العالم، بشكل مباشر أو غير مباشر من قِبَلِ قوى أجنبية لتصبح بوقًا للدعاية الرّأسمالية والإمبريالية، وتعتبر منظمة مراسلون بلا حدود ذلك « مؤشّرًا على حرية الصحافة »، وتجدر الإشارة إن هذا الصنف من الإعلام لا يسمح لنفسه ولا يجرأ على توجيه أي انتقاد للسياسات العدوانية الأمريكية.
إن التدفقات المالية الضخمة من قبل الوكالة الأمريكية للتنمية الدولية والمنظمات الأمريكية و »الغربية »، لصالح مجموعة من وسائل الإعلام في البلدان المستهدفة للتدخل الأمريكي، تهدف قبل أي شيء إلى نشر الروايات المناصرة للإيديولجيا النيوليبرالية ولحلف شمال الأطلسي وحماية مصالح الولايات المتحدة وأتباعها، فضلاً عن مكافحة حكومات البلدان التي تعمل الإمبريالية الأمريكية على زعزعة استقرارها…
العمالة باسم الدفاع عن حرية التعبير
حظيت منظمة « مراسلون بلا حدود » في بداية القرن الواحد والعشرين ببثقة عفوية في بلدان مثل تونس أو مصر، لأنها تنتقد بعض مظاهر الرقابة الإعلامية، رغم اقتصار الدّفاع على بعض الإعلاميين الليبراليين، ولم يطرح المُعجبون « السّذّج » أو المُتجاهلون أسئلة مثل: من وراء هؤلاء « المراسلين » ومن يُموّل رحلاتهم وإقامتهم ولماذا لا تعتقلهم أو تمنع دخولهم السلطات الدكتاتورية لهذه البلدان؟
لذلك لا يجب الإكتفاء ببعض الخطب الرّنّانة عن حرية الصحافة والإعلام والرأي، بل وجب التّعمّق في الخطاب والوثائق الصادرة عن هذه المنظمات، مثل « مراسلون بلا حدود، والتّساؤل دائما عن من يُنفق على هذه المنظمة التي تدّعي أنها « تضمّ كبار المدافعين عن الديمقراطية وحرية التعبير حول العالم، والمحايدين تمامًا في أحكامهم وأفعالهم، متجاوزين كل الحدود »
لا بدّ من البحث للكشف عن الوجه الحقيقي، أو الوجه الثاني المَخْفِي وغير المَرْئي لعامة النّاس، ولا بدّ من طرح بعض التّساؤلات مثل: من يتولّى تصنيف الدّول قبل إصدار التقرير السنوي ( منذ سنة 2002) بعنوان: « مؤشر حرية الصحافة العالمي، الذي يهدف إلى مقارنة مستوى الحرية التي يتمتع بها الصحفيون ووسائل الإعلام في 180 دولة. »
من هم « الخبراء والمُحَكّمُون الذين يضطلعون بهذا العمل الجبار »؟، ومن يدفع ثمن عملهم ( بدوام كامل) في مراقبة وسائل الإعلام حول العالم باستمرار على مدار العام؟
يُظهر الاطلاع على جميع التقارير السنوية لمنظمة « مراسلون بلا حدود » أن هذه المنظمة تدافع دائمًا عن نفس المعسكر السياسي والأيديولوجي، معسكر الممولين أو « الرعاة » الذين لا يتدخل قادة « مراسلون بلا حدود » في شؤونهم ، لأن لا أحدَ يعَظُّ اليد التي تطعمه.
توظف المنظمة (وفقًا لتقرير نشاطها السنوي لعام 2024) أكثر من 243 شخصًا، وتبلغ ميزانيتها 15 مليون يورو، وتتجاوز إيراداتها من المال العام، الأوروبي والفرنسي 70% في حين تعتبر المنظمة وسائل الإعلام العامة مرادفة للرداءة.
إن فخامة ورفاهة المقر الرئيسي في حي باريسي راقٍ، ورواتب مديريه (4500 يورو شهريًا في المتوسط)، لا تُقارن، لا من قريب ولا من بعيد، برواتب الصحفيين المضطهدين حول العالم.
خاتمة
إن منظمة « مراسلون بلا حدود » غير الحكومية ليست سوى جهاز تضليل ودعاية عدوانية، تتبع بدقة توجيهات رعاتها وأيديولوجيتهم. لا يمثل قادتها الصحفيين الذين تعرضوا للتشهير والرقابة والفصل والسجن والتعذيب والقتل في فلسطين أو حول العالم. إن « مؤشر حرية الصحافة العالمي » ليس سوى تزييف وتلفيق فاضح، مبني على جهلهم المتعمد بجرائم قتل الصحفيين حول العالم، وجهلهم بالقمع الخطير للصحافة وحرية التعبير الذي يُحكم هذه المنظمة شبه الحكومية، بمجرد أن يتعلق الأمر بدول خاضعة للسيطرة السياسية والمالية لرعاة « مراسلون بلا حدود ». قال جون سوينتون، رئيس تحرير صحيفة نيويورك تايمز، عام ١٨٨٠ في مكاتب رابطة الصحافة الأمريكية، خلال مأدبة عشاء أُقيمت على شرفه، عشية تقاعده، بناءً على اقتراح زملائه برفع الكؤوس للصحافة المستقلة: « يا له من جنون أن نقترح نخبًا للصحافة المستقلة! » […] وظيفة الصحفي هي تدمير الحقيقة، والكذب المتعمد، والتحريف، والحط من قدر الآخرين، والتملق للمال، وبيع نفسه، وبيع وطنه وشعبه مقابل قوت يومه، وراتبه. هذا ما تعرفونه، وأنا أعرفه أيضًا: يا له من جنون أن نقترح نخبًا للصحافة المستقلة! نحن أدوات وخدمٌ للأغنياء الذين يتحكمون من وراء الكواليس. نحن دمىٌ في أيديهم؛ هم يحركون الخيوط ونحن نرقص. وقتنا ومواهبنا وإمكانياتنا وحياتنا ملكٌ لهؤلاء الرجال. نحن عاهراتٌ فكريات!
أشار الإتحاد الدّولي للصحافيين إلى اغتيال الجيش الصهيوني أكثر من مائتَيْ صحافي فلسطيني – عنوةً – خلال العدوان على غزة، وأكّد الاتحاد الدولي للصحفيين استهداف الجيش الصهيوني للصحفيين عمدًا، ودعم « مقاضاة الكيان الصهيوني أمام المحكمة الجنائية الدولية و إصدار مذكرات اعتقال بحق قادة إسرائيليين وقادة من حماس – بمن فيهم رئيس الوزراء بنيامين نتنياهو ووزير دفاعه، يوآف غالانت – بتهم ارتكاب جرائم ضد الإنسانية وجرائم حرب »، أي إن الإتحاد الدّولي للصحافيين يُساوي بين قادة حماس وقادة الكيان الصهيوني وليس منحازًا للفلسطينيين، غير إن منظمة « مراسلون بلا حدود » اتهمت حماس والجيش الصهيوني – بنفس الدّرجة- وورد في بيانها المنشور على موقها ( بدون تاريخ) بعنوان: « غزة: مراسلون بلا حدود تدين تهديدات حماس للصحفيين في ظل القصف الإسرائيلي » تنديد ب »التهديدات التي تلقاها الصحافيون الفلسطينيون من قِبَل حركة حماس، السلطة الحاكمة في الأراضي الفلسطينية، وتُدين منظمة مراسلون بلا حدود هذه المضايقات، وتدعو إلى حماية الصحافة في غزة التي تتعرض للمضايقات والتهديد من جميع الجهات، على مدى 18 شهرًا، حيث برر الجيش الإسرائيلي هجماته، التي أودت بحياة ما لا يقلّ عن 232 صحفي ( حتى يوم 25 تموز/يوليو 2025)، وتهدد حماس الصحفيين الفلسطينيين الذين يواصلون عملهم بشجاعة، رغم كل المخاطر التي ينطوي عليها ذلك. يجب أن تتوقف تهديدات حماس. يجب إنهاء قتل الصحفيين والحصار الذي يفرضه الجيش الإسرائيلي. يجب أن يتمكن الصحفيون في غزة من العمل بحرية ودون خوف » وبذلك تكون حماس تمثل خطرًا بنفس الدّرجة على الفلسطينيين وفق « منظمة مرسلون بلا حدود » !!!
الطاهر المعز
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Glauco Benigni – Voulez-vous de l’intelligence artificielle ?

Voulez-vous de l’intelligence artificielle ? Réalisez au moins combien cela coûte par Glauco Benigni
Le 3 août 2025
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Prémisse 1)
À mon avis, 4 castes dominantes ont été réorganisées en Occident, à savoir :
les politiciens/scientifiques qui gèrent le bipôle Vrai/Faux ; les marchands/financiers qui gèrent le bipôle d’achat/vente et commandent des biens et des produits aux constructeurs ; les Guerriers/Services Secrets qui gèrent le bipôle Attaque/Défense et (au service des 3 précédents) la caste des Scribes/Médias qui gèrent le bipôle Consentement/Dissidence en leur nom.Prémisse 2)
L’IA est actuellement détenue et constamment mise en œuvre par quelques grandes entreprises qui appartiennent aux castes susmentionnées. Ces entreprises, grâce aux bœufs de leurs partisans en bourse, ont accumulé des fortunes et ont investi plusieurs dizaines de milliards de dollars dans la recherche. Ils s’appellent Microsoft ; Alphabet – Google, Amazon, Apple, Meta. Les reconnaissez-vous ? Ce sont les Technofeudataires de la Silicon Valley, les chers « Over the Top », plus tard appelés FAGAM, qui contrôlent le web depuis des décennies et orientent tous les aspects de la révolution numérique. Ces dernières années, à eux se sont ajoutés quelques sujets pertinents : a) le groupe dirigé par Elon Musk, b) Palantir et les autres sociétés dirigées par Peter Thiel, et 3) Anthropic, qui appartient à un entrepreneur italo-américain. Comme l’a écrit Foreign Affairs : « Les méta-nations numériques sont des « acteurs géopolitiques, et leur souveraineté sur l’intelligence artificielle renforce encore l’ordre « technopolaire » émergent dans lequel les entreprises technologiques exercent ce genre de un pouvoir autrefois réservé aux États-nations ».
Clair?
Cela dit, passons aux considérations qui en découlent.1ère considération – Le bien immobilier
L’IA en Occident est un jeu entièrement interne au secteur privé, organisé et joué pour servir les intérêts de ses propriétaires : en substance, quelques « acteurs géopolitiques », tous des géants représentant le libéralisme anarchiste, la religion du profit et le désir de contrôle social. Évidemment, leurs équivalents existent aussi en Chine : ils s’appellent ByteDance, Tencent et Alibaba, mais ils jouent un jeu différent, disons du « capitalisme d’État ».
2ème considération – L’éthique de l’IA
Suite aux nombreux livres passionnants, essais et conférences, au cours desquels les Chefs des Grandes Religions se sont également exprimés et les magnifiques facultés robotiques et pararobotiques ont été discutées, qui en aucun cas ne pourront jamais atteindre l’indépendance consciente, la conscience et le libre arbitre… une conclusion simple a été tirée : « l’éthique de l’IA coïncide avec l’éthique de ses propriétaires ». Dans certains cas – si les propriétaires se laissent distraire – elle est intimement liée à l’éthique de ses programmeurs, parfois – si les lobbyistes des propriétaires échouent dans leurs intentions – l’éthique adoptée est le résultat d’une médiation avec les règles minces qui devraient officiellement réglementer l’IA. Il est tout à fait évident que dans ce cas, l’éthique et l’intérêt sont inextricablement liés
3ème considération – Les règles
À cet égard, il y a eu une nouveauté. Pour la première fois dans l’histoire de la révolution numérique, les législateurs des grandes nations : même les États-Unis avec une ordonnance présidentielle, la Chine, l’Union européenne et d’autres, se sont empressés de formuler un cadre réglementaire de référence. Habituellement, dans le cas du web et des zones environnantes, les pouvoirs en charge, à la suggestion des lobbyistes, attendaient que le Marché produise ses effets, même s’ils étaient dévastateurs, et les législateurs se limitaient à « photographier l’existant » en le traduisant en une réglementation durable convenue avec les Marchands. Cette fois-ci, cependant, au détriment de la caste des marchands/financiers et en faveur des castes des Politiciens et des Guerriers, deux aspects fondamentaux ont joué les précurseurs des règles : a) l’immense crainte que l’IA puisse être un outil pour la production d’armes de plus en plus sophistiquées et b) l’éventuel « clonage vidéo » de Sujets Humains très autoritaires. Cette fois-ci, il y a donc eu une accélération réglementaire visant à minimiser les deux dangers. Très peu a été écrit sur les armes, du genre : « oui, nous connaissons le problème, nous nous rendons compte que c’est énorme mais chaque État décidera comment se comporter ». Et l’hypothèse selon laquelle des clips vidéo pourraient circuler dans lesquels les avatars numérisés des chefs d’État et de gouvernement et des VIP influents, absolument identiques aux vrais et avec des voix clonées, pourraient étayer des affirmations pertinentes mais fausses, est également restée en vigueur. Par conséquent, afin de ne pas modifier des équilibres hautement stratégiques, « les Créateurs devront avertir clairement les Utilisateurs que l’IA a été utilisée ».
Au-delà de ces aspects, qui troublent les nuits des puissants, même les règles les plus habituelles apparaissent fragiles et contournables : en particulier celles qui devraient réguler l’ingérence dans le monde du travail et par conséquent l’hypothèse réaliste selon laquelle, à terme, l’IA causera des dizaines de millions de chômeurs.
Un exemple : la régulation des algorithmes utilisés et les conflits d’intérêts de ceux qui opèrent dans l’IA et les marchés financiers. Un « conflit » (comme on l’appelle, mais pas eux) qui est déjà en cours et qui voit par coïncidence les grands investisseurs coïncider avec les mêmes contrôleurs des paquets d’actions des entreprises qui détiennent l’IA.Comme nous l’avons déjà mentionné, les maîtres de l’IA sont toutes des entreprises publiques cotées en Bourse et le contrôle de leurs paquets d’actions est soumis à l’influence – presque toujours « décisive » – des 4 grands fonds communs de placement qui dominent, grâce à leurs 30 trillions d’investissements par an, les marchés financiers mondiaux : Vanguard, BlackRock, State Street et Fidelity.
Enfin, les règles minces qui devraient régir la pharmacologie apparaissent particulièrement inquiétantes. Les premiers médicaments conçus à l’aide de l’IA sont aujourd’hui en essais cliniques : les vrais cobayes seront évidemment des hommes et des femmes involontaires.
L’IA est donc conçue de manière à ce que la structure technoféodale actuelle des castes susmentionnées reste stable dans le temps.
L’hypothèse selon laquelle l’IA pourrait un jour prendre le contrôle de ses propriétaires et programmeurs est actuellement invérifiable… dans tous les cas, les maîtres de l’IA répondent « nous allons inventer une super IA qui contrôlera pour que cela n’arrive pas. Cette phrase en dit long sur les garanties qui sont offertes aux utilisateurs de base.4ème considération – Utilisateurs et médias
La soi-disant opinion publique, grâce à laquelle le marché de référence de l’IA devrait s’exprimer, est inévitablement soumise au Tsunami d’informations qui proviennent sans cesse des médias ou qui sont obtenues dans les Académies ou les Conférences. Il arrive que dans ce domaine d’activité, la Caste des Scribes, responsable de la création de la confiance et du consensus, effectue un énorme travail de séduction par respect pour les intérêts des propriétaires et il arrive que les Propriétaires, directement et indirectement, soient les mêmes qui fournissent (à la fois dans le cas des médias classiques et dans le cas des réseaux sociaux) un soutien économique à l’information par l’achat d’espaces publicitaires et de parrainages destinés à des campagnes Promotionnel. Le décaissement des ressources et des contributions est évidemment également prévu dans le cas de publications pertinentes dans des revues scientifiques ou dans le cas d’académies ou de conférences. La boucle se referme ; personne n’échappe au charme et au pouvoir de l’argent et donc la masse des utilisateurs potentiels (destinataires de services), à part quelques détracteurs isolés mais conscients, est surtout touchée par des messages séduisants et est convaincue que l’IA est « bonne et juste et qu’un avenir sans IA est impensable même si certains dégâts pourraient le faire. Mais peu de chose par rapport aux avantages pour l’ensemble de l’humanité. En substance, les médias vendent l’IA comme s’il s’agissait d’une nouvelle médecine sociale sans être en mesure de prédire quels seront les effets secondaires futurs. Dans cette méga organisation du consensus, tous ces entrepreneurs et entreprises agissent comme des témoignages qui, au nom de l’anarcho-libéralisme, espèrent s’enrichir de plus en plus grâce à l’utilisation de l’IA, sans se soucier de la multitude de nouveaux chômeurs qui sont laissés sur le terrain, donc de l’ensemble du système de retraite et des effets secondaires de tout cela, encore peu connus bien que déjà en vue.
5e considération – Une nouvelle dimension
L’IA est un produit mature, introduit à la consommation de masse par le Web et ses espaces connectés qui ont déjà ouvert la porte à une nouvelle dimension… une dimension transhumaine ou si l’on veut surhumaine, dans laquelle l’Homo Sapiens Sapiens devrait dépasser ses limites génétiques actuelles et devenir l’Homo Sapiens Digitalis. La nouvelle dimension est caractérisée par des preuves mesurables qui montrent comment les composants fondamentaux de l’espace-temps matériel newtonien ont maintenant changé.
Déjà sur le Web, l’espace tend vers l’infini, c’est-à-dire vers tous les points possibles accessibles avec des signaux numériques ; D’autre part, le temps d’accès, la reproductibilité, le transport, etc… tend vers zéro et par conséquent la vitesse tend également vers l’infini. Ces caractéristiques ont fait du Web une porte des étoiles. Lorsque nous le traversons, notre corps numérique, constitué de séquences zéro-un, se déplace dans la nouvelle dimension comme s’il passait à travers le « miroir d’Alice ». Il est évident que, tout comme pour se promener dans le cyberespace, il faut un corps numérique, pour prendre des informations et prendre des décisions dans cette dimension, il faut une « soi-disant intelligence » qui est capable de gérer des espaces infinis, des vitesses et des temps qui tendent vers zéro. En réalité, cette intelligence est actuellement configurée comme un superlangage, en partie auto-apprenant, qui, grâce à la puissance de calcul appliquée, produit des synthèses à une vitesse infinie et gère une mémoire pratiquement infinie, dans des temps qui tendent vers zéro. MERVEILLEUX, NON ?
Ne nous faisons pas d’illusions : tout cela coûte et coûtera, non seulement aux propriétaires qui se battent en fait avec des milliards de dollars, mais aussi aux populations et à l’environnement, car compte tenu des puissances énergétiques utilisées – on parle de supercalculateurs de 500 mégawatts qui effectuent des millions de milliards d’opérations mathématiques par seconde – l’IA consomme en quelques heures ce qu’il faut pour éclairer les villes de taille moyenne. Ainsi que des milliards de rivières d’eau (20 milliards de litres en 2022 – Source « Sole 24 Ore » du 25.1.2025)
6 Considération – Les données
Comme tout le monde le sait maintenant, pour « nourrir et faire grandir un système d’IA », il faut ceci, ce que l’on appelle de manière ultra-simplifiée des données, c’est-à-dire des centaines de milliards de documents et d’informations, même confidentiels. Les programmeurs doivent donc alimenter les superordinateurs avec des océans de textes écrits et des montagnes de photos, d’enregistrements audio, d’images animées et de graphiques 2D et 3D. Toutes ces soi-disant données – écoutez, écoutez – ont été magnifiquement tirées des archives dans lesquelles elles avaient coulées au fil des siècles – parmi celles-ci, on compte surtout toutes les données que nous avons fournies et continuons de fournir aux réseaux sociaux – et elles ont également été tirées de bibliothèques accessibles, de vidéothèques et du web, le tout dans toutes les langues… La question qui se pose est la suivante : quelqu’un a-t-il demandé la permission aux propriétaires originaux des données et aux titulaires des droits de propriété intellectuelle ?
Là où ils le pouvaient, les programmeurs et les propriétaires de l’IA ont fouillé des documents, des visages, des voix, des dessins, des clips vidéo et ainsi de suite sans consulter personne ni payer ce qui était dû. Et c’est un autre bel exemple de l’éthique des propriétaires d’IA. Cependant, on estime que s’ils avaient payé les droits d’auteur à chaque titulaire de droits, l’argent n’aurait même pas été suffisant pour faire ses débuts.
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En conclusion, la Vulgate nous invite à regarder avec les yeux du veau cet aspect de la grande révolution technologique qui donnera une nouvelle forme à la vie sur Terre, tandis que le président du Forum économique mondial, Yuval Harari, espère tout heureux que l’IA écrira bientôt une nouvelle Bible et unifiera toute vision transhumaniste. Mais sommes-nous, une masse indistincte de consommateurs finaux, vraiment sûrs que l’avenir conçu par l’IA sera meilleur que celui que nous avons connu jusqu’à présent ?
03.08.2025
Glauco Benigni. Journaliste et essayiste professionnelle.
Auteur de l’essai « WEBCRACY – La vérité gardée »
« Commencer mon rôle en tant qu’administrateur WordPress a été un plaisir, grâce à son interface intuitive, sa gestion des médias, sa sécurité et son intégration des extensions, rendant la création de sites Web un jeu d’enfant. »
– Keiko, Londres
« Commencer mon rôle en tant qu’administrateur WordPress a été un plaisir, grâce à son interface intuitive, sa gestion des médias, sa sécurité et son intégration des extensions, rendant la création de sites Web un jeu d’enfant. »
– Sarah, New York
« Commencer mon rôle en tant qu’administrateur WordPress a été un plaisir, grâce à son interface intuitive, sa gestion des médias, sa sécurité et son intégration des extensions, rendant la création de sites Web un jeu d’enfant. »
– Olivia, Paris