
C’est un pays d’outre-mer (POM) au sein de la République française, composée de 5 archipels regroupant 118 îles dont 76 habitées:
l’archipel de la Société avec les îles du Vent et les îles Sous-le-Ventl, l’archipel des Tuamot, l’archipel des Gambierles, îles Australes, l’archipel des Marquises.Sa voisine la plus proche, à 6 500 km à l’Est, est l’Australie. Elle inclut les vastes espaces maritimes adjacents. C’est un territoire non autonome relevant de l’article 73 de la Charte des Nations unies.
Les 1° habitants, des Austronésiens, proviennent de migrations depuis l’Asie du Sud-Est. Ils sont les 1° navigateurs de l’histoire de l’humanité. Ils atteignent les îles Marquises au IIe siècle, ont essaimé vers l’île de Pâques (500), Hawaï (900) et la Nouvelle-Zélande (1100).
Magellan découvre fortuitement Puka Puka (1 des 2 îles Infortunées). Grâce à son témoignage, le Britannique Samuel Wallis découvre Tahiti en 1767, suivi en 1768 par Bougainville et Cook en 1769.
L’implantation coloniale est de l’initiative des Britanniques qui, par la promotion de Pōmare Ier, chef de Tahiti, allié aux Anglais, fonde une “dynastie” (1790-1880), convertie au protestantisme. Des missions catholiques françaises s’implantent aux Gambier et aux Marquises à partir 1830 pour l’installer la colonie française, où, au terme de la guerre franco-tahitienne (1844-1847), la reine Pōmare IV doit accepter le protectorat français qui marginalise les autochtones, acculturés et soumis à un statut subalterne. En 1880, le roi PōmareV accepte de céder le royaume de Tahiti à la France.

La République française donne la nationalité française de plein droit à tous les sujets de l’ex-roi Pomare. Tahiti prend le nom de colonie des Établissements français de l’Océanie (EFO) et un gouverneur est assisté du directeur de l’intérieur (ex-directeur des affaires indigènes), du chef du service judiciaire et du conseil d’administration, des hauts fonctionnaires civils. Les îles indépendantes sont intégrées aux EFO.
La Polynésie française compte 283 147 habitants au recensement de 2022, (comme la Guyane) soit 0,4 % de la population française, mais 1/3 de la population des DOM-TOM. 52 % des Polynésiens ont moins de 30 ans. L’espérance de vie est de 5 ans plus basse que celle de la métropole. 3 communautés ethniques principales y vivent: les Polynésiens 78 % (218 400 hab.) ; les Européens : 12 % (33 600 hab.), les Asiatiques (pour la plupart d’origine chinoise) : 10 % (28 000 hab.
Ces nouveaux français participent aux combats de 14-18 dans le bataillon du Pacifique, parmi eux le futur chef du mouvement anticolonialiste, Pouvanaa Oopa. En 1940, les EFO rallient la France libre.
En 1942, l’armée américaine installe une base militaire sur l’île de Bora-Bora avec 6 000 soldats qui métamorphosent l’archipel.
En 1946, la IVe République établit l’Union française: les EFO deviennent territoire d’outre-mer (TOM). Le mouvement anticolonialiste se structure : en 1949, Pouvanaa Oopa est élu député et fonde le RDPT, parti autonomiste, qui domine la vie politique malgré l’Union tahitienne de Rudy Bambridge, pour le maintien de la souveraineté française. En 1957, les îles prennent le nom de « Polynésie française » et bénéficient d’un statut plus autonome grâce à la loi-cadre Defferre. Pouvanaa Oopa devient le 1° vice-président, et chef d’un gouvernement d’élus locaux aux compétences accrues, mais le gouverneur demeure le président.
Les essais nucléaires
Mais la Ve République de 1958 entraîne une mise au pas. L’arrestation de Pouvanaa Oopa, bafouant son immunité de député, condamné à 8 ans de prison et à 15 ans d’exil, est le point d’orgue de cette reprise du pouvoir par l’État central.
Car, la France chassée d’Algérie, la Polynésie française est le lieu de l’installation du Centre d’expérimentations du Pacifique (CEP) qui amène plusieurs milliers de militaires et de techniciens sur le territoire à Moruroa et à Papeete qui connaîtdonc aussi, un afflux de populations polynésiennes.
La France a mené 46 essais nucléaires atmosphériques en Polynésie entre 1966 et 1974, suivis de plus de 150 essais devenus souterrains en 1975, ils sont suspendus en 1992, mais une reprise a lieu en 1995 puis le démantèlement du CEP est décidé.
L’Union tahitienne (Rudy Bambridge, puis Gaston Flosse), ralliée au parti gaulliste (UNR, UDR puis RPR) défend les positions gouvernementales tandis que le RDPT est dissous, ce qui amène la création du Pupu Here Aia en 1965 (John Teariki). Apparaît en 1965, Francis Sanford, avec le parti E’a Api, qui adopte une orientation autonomiste. La mesure d’exil à l’encontre de Pouvanaa Oopa est levée en 1968, il est accueilli triomphalement à Papeete et devient sénateur en 1971 pour le Pupu Here Aia. Un 1° changement de statut a lieu en 1977 (autonomie de gestion), complété en 1984 (autonomie interne). En pleine renaissance culturelle polynésienne ( les langues polynésiennes retrouvent leur place dans les écoles en 1977), apparaissent des formations nettement indépendantistes, avec Oscar Temaru (FLP/Tavini Huiraatira)qui va dominer la vie politique avec Tahoeraa Huiraatira (Gaston Flosse) jusqu’en 2000.
De 1991 à 2004, Gaston Flosse règne sans partage. Il a fait également l’objet de diverses condamnations pour détournement de fonds publics. N’ayant pu obtenir une grâce présidentielle, il perd tous ses mandats. S’en suit une période d’instabilté jusqu’en 2011

La loi du 5 janvier 2010 dite « loi Morin » sur la reconnaissance des victimes des essais nucléaires français en Polynésie française et au Sahara algérien reconnaît de façon historique et officielle les dommages sanitaires causés par les expérimentations nucléaires. Cependant le 1° décret d’application se révèle trop restrictif et le président de la république prend l’engagement début 2011 d’en publier un nouveau, élargissant les zones géographiques et la liste des maladies éligibles.
En 2022, les demandes d’indemnisation des victimes des essais nucléaires ont explosé, avec 50 % de nouveaux dossiers. En mai 2023, l’INSERM publie une étude selon laquelle les essais nucléaires ont bien eu un impact sur les cancers de la thyroïde. En octobre 2023, Hina Cross, la représentante du Tavini à l’Assemblée de la Polynésie française, affirme dans une émission diffusée sur France Télévision : “C’est à nous, malades polynésiens, de prouver qu’on est malade (…) On est toujours dans un semblant de reconnaissance, avec beaucoup d’hypocrisie (…) C’est l’État français qui juge son propre crime!”
Début décembre 2024, Hachette Pacifique, principal distributeur de la presse nationale à Tahiti, annonce sa cessation d’ activité pour manque de rentabilité. Sans son activité, les buralistes de Polynésie Française ne pourront plus proposer que la presse locale.
L’économie
Son axe principal de développement demeure le tourisme, qui repose sur le riche patrimoine naturel et culturel du pays et de sa population. Les services touristiques représentaient 9 % du PIB marchand en 2006, puis la fréquentation a été en baisse en 2009..Le nombre de touristes surtout américains recommence à augmenter (+ 0,8 % par rapport à 2023, qui avait déjà battu un record de fréquentation vieux de 20 ans
Elle consiste en une économie de services, avec un secteur industriel restreint et un secteur agricole en difficulté depuis le début du XXe siècle. La majeure partie des biens consommés sont importés. Les exportations sont très limitées.
Les produits de base sont à prix (ou marges) fixés par le gouvernement. Les dépenses de l’État au titre de ses missions régaliennes, et dans une moindre mesure de ses dotations, contribuent à 1/3 du PIB, sans pour autant y effectuer aucun prélèvement direct. D’après une étude de l’AFD réalisée en 2009, les inégalités sont extrêmement importantes et 1/4 de la population vit sous le seuil de pauvreté.
Les ressources traditionnelles sont la perliculture de Tahiti pour la bijouterie qui est très développée, mais en grande difficulté, le prix à l’exportation ayant considérablement chuté.
La production de la vanille de Tahiti, de grande qualité, est passée de 200 T dans les années 1960 à des niveaux très bas. Un plan de relance initié en 2003 a permis de relever la production à 49 T mais seulement 9 T ont été exportées en 2008.
Le développement de flottilles de pêche au thon, commencé dans les années 1990, ne permet toujours pas d’atteindre les quotas autorisés (6 300 T pêchées contre 10 000 autorisées).
Le coprah (huile du fruit, savon et beauté et les tourteaux en nourriture pour animaux) est une ressource financière pour de nombreuses familles , surtout dans l’archipel des Tuamotu.mais elle déficitaire. Le gouvernement de la Polynésie française le subventionne afin d’éviter l’exode vers Tahiti et de préserver ce revenu précieux parfois unique. « C’est quand même une ressource économique, une production qui existe depuis le milieu du XIXe siècle avec 40 000 ha. de cocotiers : c’est la 1° filière agricole locale, en valeur, en nombre d’actifs et en surface » a précisé le directeur de l’Agriculture en Polynésie, P. Couraud, en mars 2022.
Industrie
Elle repose sur 4 pôles : agroalimentaire, construction navale et biens intermédiaires pour le bâtiment et des activités de transformation (meubles, textile, imprimerie…) Le secteur représente 9 % du PIB marchand en 2006. Divers secteurs sont protégés par une taxe de développement local à l’importation (TDIL) qui frappe les produits importés concurrents (entre 2 % et 82 %). Environ 3 000 entreprises ( 1 000 dans l’agro-alimentaire) génèrent un chiffre d’affaires de l’ordre de 100 milliards de francs pacifique.
L’artisanat emploie environ 10 000 artisans recensés par la Chambre de commerce, d’industrie, des services et des métiers (CCISM).Il est réputée pour ses bijoux réalisés à partir des matières premières locales : nacre, bois, os, fibres de coco et perles de Tahiti. La nacre est utilisée depuis longtemps en Polynésie pour confectionner bijoux et parures. Néanmoins, l’artisanat s’exprime traditionnellement plutôt au travers des Tīfaifai (tissu décoré par un système proche du patchwork), du Tapa (tissu traditionnel confectionné à partir d’écorce) qui sert à fabriquer les pāreu (paréo), le tressage (paniers, matériaux de couverture nī’au (à partir de palmes de cocotiers).

L’état des lieux
A Tahiti, un réseau de transports en commun n’xiste pas.
Le transport aérien intérieur est assuré par la compagnie Air Tahiti qui dessert 60 destinations et transporte 700 000 passagers par an.
Le port de Papeete est le plus important. Il est le 1° port de France par le nombre de voyageurs, du fait des échanges avec Moorea (1,7 M de passagers annuel). Il reçoit chaque année, 1 M de T de fret. En retour, seulement 30 000 T sont expédiées.
La desserte maritime inter-insulaire joue un rôle essentiel. Elle est assurée par des entreprises privées. 400 000 T de marchandises sont acheminées de Papeete vers une des autres îles chaque année.
L’internet connaît un essor rapide renforcé par la mise en service d’un câble sous-marin en 2010 (Honotua relie Tahiti, Moorea, Bora Bora, Raiatea, Huahine à Hawaii), en substitution aux liaisons satellites utilisées jusqu’alors. Mana, filiale de l’Office des postes et télécommunications, opérateur historique détient l’essentiel du marché. 30 000 foyers sont abonnés à internet.
La téléphonie mobile est apparue en 1995. Depuis 2013, PMT-Vodafone s’impose comme concurrent de l’opérateur historique polynésien (Tikiphone commercialisé sous VINI), mettant fin au monopole. L’ensemble du territoire est quasiment couvert (61 îles en 2009), et plus de 200 000 clients sont recensés.
La production et la distribution d’électricité sont assurées par l’opérateur Électricité de Tahiti (28 communes desservies sur 48, couvrant près de 90 % de la population).

Par contre, seulement la 1/2 de la population a accès à de l’eau potable. Sur les îles hautes les ressources sont abondantes, mais le faible rendement des réseaux couplé à une surconsommation rendent difficile l’établissement d’un service d’eau potable économiquement viable.
Le référendum du 28 septembre 1958, proposé par Charles de Gaulle, demande aux Français de ratifier le projet de Constitution de la Ve République dont la création de la Communauté française. La Constitution française indique dans son préambule : « En vertu du principe de libre détermination des peuples, la République offre aux territoires d’outre-mer qui manifestent la volonté d’y adhérer, des institutions fondées sur l’idéal commun de liberté, d’égalité et de fraternité ». Par ailleurs, le préambule de la Constitution de 1946 (toujours en vigueur en 1958) dit : « Fidèle à sa mission traditionnelle, la France entend conduire les peuples dont elle a pris la charge, à la liberté de s’administrer eux-mêmes et de gérer démocratiquement leurs propres affaires ; écartant tout système de colonisation fondé sur l’arbitraire, elle garantit à tous l’égal accès aux fonctions publiques et l’exercice individuel ou collectif des droits et libertés proclamés ». Enfin dans son article 53, il impose : « Nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire n’est valable sans le consentement des populations intéressées ».
En Polynésie française, si globalement les habitants votent « oui », le « non » l’emporte aux îles Sous-le-Vent, à Huahine, fief de Pouvanaa Oopa. Au contraire, les îles Marquises votent pour le oui, à près de 90 %.
Les partis E’a Api de Francis Sanford et Here Ai’a prennent le relais de Pouvanaa Oopa après sa dissolution en 1963. Oscar Temaru fonde le Front de libération de la Polynésie (FLP) en 1977, avec le nom de Tavini huiraatira no te ao Ma’ohi (Serviteur du peuple polynésien) en 1983. Il remporte les élections du 23 mai 2004 où il est à la tête d’une liste d’alliance contre Gaston Flosse. Mais sa coalition ne résiste pas. La période d’instabilité qui suit lui permet d’accéder plusieurs fois à la présidence.
En 2011, le président indépendantiste Oscar Temaru annonce vouloir mettre fin à « 170 ans de colonisation » en Polynésie française en sollicitant l’inscription de la collectivité sur la liste des territoires non autonomes à décoloniser de l’ONU. Le sénateur indépendantiste Richard Tuheiava assure avoir obtenu le soutien « d’au moins 10 » des 16 membres du Forum. Il déclare : « Nous avons des problèmes de santé, des problèmes économiques, qui sont tous les conséquences des décisions du gouvernement français de nous utiliser pour réaliser ses essais nucléaires». Nicolas Sarkozy l’a qualifié de « démagogie ».

Au cours de l’année 2012, Oscar Temaru se livre à un intense lobbying auprès des micro-États de l’Océanie, dont plusieurs, les Îles Salomon, Nauru et Tuvalu déposent auprès de l’Assemblée générale de l’ONU un projet de résolution visant à affirmer « le droit inaliénable de la population de la Polynésie française à l’autodétermination et à l’indépendance ». Lors de sa 1°séance, la nouvelle, l’Assemblée territoriale adopte par 46 voix contre 10 un « vœu » exprimant le souhait 70 % des électeurs polynésiens, de conserver leur autonomie au sein de la République française. Malgré ce vœu, l’Assemblée générale de l’ONU inscrit la Polynésie française sur la liste des territoires à décoloniser lors de son assemblée plénière de 2013. La France ne participe pas à cette session, pendant que l’Allemagne, les États-Unis, les Pays-Bas et le Royaume-Uni se désolidarisent de cette résolution.
En mai 2013, l’UPLD (11 sièges) perd les élections à l’Assemblée de Polynésie face à Gaston Flosse (38 sièges), et le parti autonomiste A Ti’a Porinetia (8 sièges). La défaite de l’UPLD aux élections démontre que la population n’était pas complètement d’accord avec ce mouvement indépendantiste initié par Oscar Temaru.

