Depuis sa mise en circulation, la Dépakine, censée prévenir les crises des épileptiques et bipolaires aurait causé malformation et troubles cognitifs à plus de 50 000 enfants. Le médicament, sans danger pour les patientes, est hautement toxique pour le fœtus. Le valproate de sodium (ou Dépakine) est un médicament anti-épileptique. Son usage pendant la grossesse a des effets délétères sur la santé de l’enfant à naître, augmentant le risque de troubles du neurodéveloppement dont l’autisme et de malformations congénitales.

1967 – Une importante découverte médicale pour les épileptiques. Une nouvelle molécule, le valproate de sodium, révolutionne la vie des épileptiques. La Dépakine est lancée sur le marché et reconnue pour prévenir les crises sans que des effets secondaires ne soient décelés sur les patients eux-mêmes

1982 – Première alerte sur les effets secondaires de la dépakine pour les femmes enceintes. Le Dr Élisabeth Robert-Gnansia, spécialiste française des malformations congénitales est la 1° à alerter la communauté scientifique. Elle découvre que la Dépakine entraîne des défauts de fermeture sur la colonne vertébrale et présente ses travaux à une réunion d’épidémiologistes du monde entier. Très vite, ils s’aperçoivent que la Dépakine multiplie par 30 les troubles du développement chez le fœtus. Les livres de médecines répercutent alors l’information mais le médicament continue à être commercialisé.

1986 – La notice est modifiée. Elle stipule seulement : « prévenez votre médecin si vous êtes enceinte ». Mais ne mentionne pas les troubles cognitifs.

2006-2013 – les dangers de la Dépakine intègrent progressivement la notice. En 2006, la notice déconseille pour la 1° fois la prise médicamenteuse pendant une grossesse. 

À partir de 2010, les autorités sanitaires ont autorisé la mise à jour de la notice, à la fois pour les risques de malformations congénitales et pour les troubles neuro-développementaux. le risque d’impact sur le développement cognitif de l’enfant intègre à son tour la notice. Ce risque, connu depuis le début des années 2000, mettra plus d’une décennie avant de figurer sur la liste des effets secondaires de l’anti-épileptique.

2011-2014 – Depuis sa création en 2011, l’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant (Apesac) tente d’attirer l’attention sur « les enfants Dépakine ». Sa fondatrice Marine Martin déclarait en 2012, dans une interview pour Ouest-France : « Le diagnostic a été très long à poser. C’est sur Internet que j’ai découvert que le docteur Éléphant signalait les dangers et décrivait les conséquences concrètes de la dépakine. C’est ce que vit mon fils ». Elle sera la 1° à porter le problème sur la scène publique, en interpellant médias et gouvernants.

Mai 2015 - Le scandale de la Dépakine éclate au grand jour. Le parquet de Paris ouvre alors une enquête sur les conditions d’autorisation et de commercialisation de la Dépakine. Dans la foulée, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, saisit l’inspection générale des affaires sociales (Igas) pour ouvrir une enquête.

Selon l’avocat de l’Apesac, qui a défendu également les victimes du Médiator, un rapport qui date de 2000 prouve que Sanofi était au courant depuis longtemps, mais pas inquiété un instant. Le laboratoire a fait savoir qu’il a « toujours respecté ses obligations d’information auprès des professionnels de santé comme des patients ».

1er mars 2016 – Pour la 1° fois, la notice du médicament proscrit son usage aux femmes enceintes. Depuis, la mention « Dépakine + grossesse = risque » apparaît très visiblement au dos de l’emballage.

Un rapport de l’ANSM de 2019 estime qu’en 2017, environ 100 000 patientes atteintes d’épilepsie étaient en âge de procréer, la très grande majorité d’entre elles étant traitées. Certains antiépileptiques sont également prescrits dans d’autres indications telles que les maladies psychiatriques (troubles bipolaires) ou neurologiques (douleur…). Ainsi, au total, en 2017, 147 875 femmes en âge de procréer avaient eu une prescription de prégabaline, 64 553 de lamotrigine et 59 615 de valproate de sodium, pour ne prendre que les plus fréquentes. Le nombre de femmes enceintes traitées par un antiépileptique a diminué au cours des 10 dernières années, passant de 7 803 en 2010 à près de 6 000 en 2019, l’utilisation de valproate ayant très fortement chuté, pendant que celle d’autres antiépileptiques augmentait.

Les médicaments concernés sont les médicaments à base de valproate ou l’un de ses
dérivés : DEPAKINE®, DEPAKOTE®, DEPAMIDE®, MICROPAKINE® et ses génériques.
En cas de prise par une femme pendant sa grossesse, le valproate de sodium entraîne
chez l’enfant à naître, dans environ 10% des cas, des malformations et dans 30 à 40%
des cas, des troubles du neuro-développement tels que : troubles du spectre de l’autisme, troubles du développement intellectuel, troubles du langage et des apprentissages, ou troubles de l’attention avec ou sans hyperactivité.

Quelles sont les conditions d’accès ?

Le dispositif a vocation à s’appliquer lorsque les conditions suivantes sont remplies :

*le valproate de sodium ou l’un de ses dérivés a été prescrit au cours de la grossesse et avant le 31 décembre 2015.

*une exposition au valproate de sodium ou à l’un de ses dérivés (Dépakine®, Depakote®, Depamide®, Micropakine® et génériques) est établie ; cette exposition s’est produite au cours d’une grossesse ;

*La personne physique née d’une mère ayant été traitée par du valproate de sodium ou par l’un de ses dérivés présente une ou plusieurs malformations et/ou des troubles du développement.

Dépakine : Sanofi condamné à indemniser la lanceuse d’alerte Marine Martin après douze ans de procédure 10 septembre 2024

Marine Martin, la lanceuse d’alerte, connait le dossier sur le bout des ongles. Cette habitante de Perpignan est épileptique depuis l’âge de 6 ans. Elle a pris longtemps de la Dépakine avant de changer de traitement en 2010. Diplômée en Sciences de l’éducation, mariée à un conseiller principal d’Education, emploi jeune dans une école puis salariée d’une société de transport, Marine Martin est la maman de 2 enfants, Salomé, née en 1999 et Nathan, né en 2002, tous 2 atteints d’ « embryofoetopathie au valproate » .

Pour elle, « Sanofi savait déjà les risques de troubles comportementaux dès les années 1980 et n’a pas alerté les patientes épileptiques enceintes ». Quant aux malformations, « elles ont été largement minimisées, les médecins n’informant que sur un nombre très limité de risques ». Il s’agit des « les mêmes mécanismes de conflits d’intérêts » que dans le scandale du Mediator . A la justice de trancher.

L’affaire du Mediator est une affaire sanitaire et judiciaire concernant les personnes victimes de la prise de benfluorex, commercialisé sous le nom de Mediator par les laboratoires Servier de 1976 à 2009. Le Mediator est accusé d’avoir causé la mort de 1 500 à 2 100 personnes, sans compter celles qui souffrent encore 10 ans après des conséquences des effets secondaires. En avril 2019, les laboratoires Servier versent plus de 115 millions d’euros aux victimes du Mediator : 3 600 patients reçoivent une offre d’indemnisation. En septembre 2019, le laboratoire saisit le tribunal administratif pour demander à l’État le remboursement de 30 % des sommes déjà versées aux victimes. A la suite de cette affaire, en 2012, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (l’Afssaps) a été remplacée par « l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé » (ANSM). Le fonctionnement de l’Agence du médicament est réformé. L’ANSM est financée par l’État et a exclu l’industrie pharmaceutique de son conseil d’administration qui comprend des parlementaires ou des représentants de l’ordre des pharmaciens.

L’Association des Parents d’Enfants souffrant du Syndrome de l’Anti-Convulsivant est une organisation nationale, agréée par le ministère de la Santé.  Elle dispose d’un conseil scientifique représenté par le Dr Toulemonde (médecin psychiatre Normandie), le Dr Ben-Ari (Chercheur à l’Inserm à Marseille), le Dr Lemonnier (Responsable du CRA de Brest) ainsi que le Dr Signoret (Pédiatre à Annecy).

Marine n’a jamais raté une prise, même durant sa grossesse. «En cas de grossesse, prévenez votre médecin», recommandait la notice. Elle est allée au-delà lorsqu’elle a appris qu’elle attendait un enfant. Elle a averti son neurologue, son gynécologue, son généraliste : « Ils m’ont tous dit qu’il n’y avait pas de problèmes. »

Ses 1° inquiétudes sont arrivées à la naissance du dernier, le plus sévèrement touché. Nathan présente un syndrome de spectre autistique (troubles de la communication, de la relation), un trouble de l’attention important « qui le pénalise », des difficultés motrices – « des maladresses mais aussi l’impossibilité pour lui d’avoir une écriture correcte ». Sans oublier le principal : « Mon fils a un ensemble d’atteintes physiques, le fameux faciès Dépakine. »

Sa soeur présente les mêmes difficultés, mais dans une moindre mesure. Depuis, Marine Martin mène un long combat contre le laboratoire Sanofi, son inertie, ainsi que celle de l’Etat français qui, pour elle, a eu « une volonté délibérée de ne pas réagir ».  Elle a la même opiniâtreté que la pneumologue Irène Frachon – « sans elle, je n’aurais jamais osé » –  la lanceuse d’alerte du Mediator.

En 2011, pour ne pas partir seule, elle choisit de créer l’association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant (Apesac). Elle prend également un avocat, Charles-Joseph Oudin, qui s’est fait connaître avec le procès intenté contre les laboratoires Servier, fabricants du Mediator. « Je l’ai vu à la télé, il a accepté. Il m’évite de tomber dans les pièges », indique-t-elle, au quotidien Le Midi Libre, le 3 janvier dernier.

En 2012, elle dépose plainte contre X au civil, « visant indirectement le laboratoire Sanofi et l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) ». En décembre 2015, un lien de causalité est établi, lors de l’expertise judiciaire, entre la prise de Dépakine et les troubles de ses enfants. En 2015, elle lance une action au pénal. Aujourd’hui, Marine se questionne:

« Maintenant, qui va payer ? Sanofi ? Les médecins prescripteurs ? L’Etat?