
Un nouveau livre examine la façon dont il se perpétue
L’Allemagne a été une puissance coloniale importante et souvent brutale en Afrique. Mais cette histoire coloniale n’est pas racontée aussi souvent que celle d’autres nations impérialistes. Un nouveau livre intitulé: La longue ombre du colonialisme allemand : amnésie, négationnisme et révisionnisme, vise à faire la lumière sur le passé. Il examine comment cet héritage se reflète dans la société, la politique et les médias allemands. Nous avons interrogé son auteur:
Quelle est l’histoire du colonialisme allemand en Afrique ?
L’Allemagne impériale a tardé à s’engager dans la conquête de l’Afrique, avec des accords douteux marquant son entrée dans le continent de manière pseudo-légale. Le Sud-Ouest africain (aujourd’hui la Namibie), le Cameroun et le Togo ont été proclamés, par euphémisme, comme des possessions sous “protection allemande” en 1884. L’Afrique de l’Est (l’actuelle Tanzanie et certaines parties du Rwanda et du Burundi) a suivi en 1886.
La domination allemande a laissé des traces de destruction. La guerre contre le peuple Hehe en Afrique de l’Est (1890-1898) a donné le signal de ce qui allait se passer. Elle a servi de terrain d’entraînement à une génération d’officiers de l’armée coloniale allemande. Ils ont ensuite appliqué leurs compétences impitoyables dans d’autres régions. L’état d’esprit était celle de l’extermination.
La guerre contre les Ovaherero et les Nama dans le sud-ouest de l’Afrique (1904-1908) a abouti au 1° génocide du XXe siècle. La guerre contre les Maji-Maji (ou Maï-Maï) en Afrique de l’Est (1905-1907) a appliqué une politique de terre brûlée. Dans chaque cas, le nombre de morts africains est estimé à 75 000.
Les “expéditions punitives” ont également été à l’ordre du jour au Cameroun et au Togo. Les traitements inhumains comprenaient les châtiments corporels et les exécutions, les abus sexuels et le travail forcé qui faisaient partie des formes de “violence blanche”.
Pendant les 30 années de colonisation allemande (1884-1914), le nombre de colons allemands dans les colonies n’a jamais dépassé 50 000, même au plus fort des déploiements militaires. En revanche, plusieurs centaines de milliers d’Africains ont perdu la vie en conséquence directe de la violence coloniale allemande.

Pourquoi pensez-vous que le débat allemand sur ce sujet avance si lentement ?
Après sa défaite lors de la première guerre mondiale (1914-1918), l’empire allemand a été déclaré inapte à poursuivre la colonisation. En 1919, le Traité de Versailles a réparti les territoires allemands entre les États alliés (Grande-Bretagne, France et autres). Le gâteau colonial est en quelque sorte redistribué.
Cela n’a pas mis fin aux ambitions coloniales de l’Allemagne humiliée. Sous la République de Weimar (1919-1933), la propagande coloniale a prospéré. Elle prend une nouvelle tournure sous le régime nazi d’Adolf Hitler (1933-1945). Le Lebensraum (espace vital) en tant que projet colonial s’est déplacé vers l’Europe de l’Est.
L’obsession aryenne pour la suprématie raciale a culminé dans l’Holocauste, marqué par l’extermination massive du peuple. Cependant, d’autres victimes ont également été touchées, notamment les Sinti et Rom et d’autres groupes (Africains, homosexuels, communistes). L’Holocauste a éclipsé les crimes allemands contre l’humanité antérieurs de l’ère coloniale.
Après la Seconde Guerre mondiale (1939-1945), le colonialisme allemand est devenu un épisode marginal de l’histoire. La répression s’est transformée en amnésie coloniale. Mais, comme l’historienne et philosophe juive germano-américaine, Hannah Arendt l’a suggéré en 1951 déjà, la domination coloniale allemande a été un précurseur du régime nazi. De telles affirmations sont souvent discréditées et qualifiés d’antisémites pour avoir minimisé la singularité de l’Holocauste. Un tel verrouillage empêche d’analyser la façon dont le colonialisme allemand a marqué le début d’une trajectoire de violence de masse.
Comment cette histoire coloniale se manifeste-t-elle aujourd’hui en Allemagne ?
Jusqu’au début du XXI° siècle, les vestiges coloniaux tels que les monuments et les noms de bâtiments, de lieux et de rues n’étaient guère remis en question. Grâce à une nouvelle génération de chercheurs, aux agences postcoloniales locales et surtout à une communauté afro-allemande active, la prise de conscience publique commence à évoluer.
Diverses initiatives remettent en question la mémoire coloniale dans la sphère publique. La recontextualisation de l’éléphant de Brême, un monument colonial, en est un bon exemple. Ce qui était autrefois un hommage aux soldats allemands tombés au combat est devenu un monument anticolonial commémorant les victimes namibiennes du génocide. Les noms de rue coloniaux sont aujourd’hui rebaptisés aux noms de résistants africains à la domination coloniale.
De nombreux crânes, dont ceux de dirigeants africains décapités, ont été envoyés en Allemagne pendant la période coloniale. Ils étaient destinés à des recherches anthropologiques pseudo-scientifiques obsédées par la supériorité des Blancs et des Aryens. Les descendants des communautés africaines concernées continuent aujourd’hui de rechercher les restes de leurs ancêtres et exigent leur restitution.

De même, des objets culturels ont été pillés et se trouvent dans des musées allemands et des collections privées. La recherche systématique de la provenance de ces objets ne fait que commencer. Les transactions telles que la restitution des bronzes du Bénin en Allemagne restent un sujet de négociation.
Le gouvernement allemand a admis, en 2015, que la guerre contre les Ovaherero et les Nama dans l’actuelle Namibie était assimilable à un génocide. Depuis lors, des négociations germano-namibiennes ont eu lieu, mais l’expiation limitée de l’Allemagne est un sujet de contestation et de controverse.
Quel message espérez-vous que les lecteurs retiennent de ce livre ?
La douleur et les séquelles du colonialisme continuent d’affecter les sociétés africaines aujourd’hui à bien des égards. J’espère que les descendants des colonisateurs prendront conscience que nous sommes les produits d’un passé qui reste vivant dans le présent. Que la décolonisation est aussi une affaire personnelle. En tant que descendants de colonisateurs, nous devons examiner d’un œil critique notre état d’esprit, nos attitudes, et ne pas supposer que les relations coloniales n’ont eu aucun effet sur nous. Le remords et l’expiation nécessitent plus que de simples gestes symboliques. Dans les relations officielles avec les sociétés anciennement colonisées, les rapports de force inégaux perdurent. Cela revient à perpétuer les mentalités coloniales et les hiérarchies suprématistes. Aucune ancienne puissance coloniale n’est disposée à compenser de manière significative son exploitation, ses atrocités et ses injustices. Il n’y a pas de réparations matérielles significatives ni d’efforts crédibles pour présenter des excuses.
“ L’ère coloniale n’est pas un chapitre clos de l’histoire. Elle reste un présent non résolu” comme l’a écrit le romancier américain William Faulkner :
À lire aussi :
–Colonial amnesia and Germany’s efforts to achieve ‘internal liberation’

Pour mieux comprendre l’article ci-dessus, je (Laure Lemaire) me permets d’ajouter quelques éléments précis de l’Histoire de cette colonisation allemande qui fut brève dans le temps puisqu’elle prend fin avec sa défaite à l’issue de la 1° guerre mondiale. Je me cantonne à l’Afrique dont l’article parle essentiellement. Un article spécial sera consacré à l’Afrique du Sud dont la Namibie
Personnellement, de nationalité française et Algérienne de coeur, sachant de quoi je parle, je dirais que toutes les colonisations sont inhumaines et atroces mais celle de l’Allemagne, brève et cantonnée dans l’espace, est loin d’égaler les ravages de la colonisation de l’empire britannique dans le monde, loin de l’innommable génocide de l’entité sioniste en Palestine.
La véritable naissance de l’Empire colonial allemand se situe après l’unification du pays en 1871. La création de la Kaiserliche Marine lui permet de se lancer dans l’aventure au début de 1880.
L’Allemagne s’établit dans le Sud-Ouest africain ( Namibie) en 1883. En 1884, le Dr Gustav Nachtigal, explorateur, proclame officiellement le protectorat les territoires qui deviendront le Togoland et le Kamerun, puis en l’Afrique orientale (le Tanganyika devient la Tanzanie) et le Ruanda-Urundi en 1885. En quelques mois, l’Allemagne se retrouve à la tête d’un empire colonial 5 fois plus grand que son territoire métropolitain, mais très peu peuplé. L’aphorisme du chancelier allemand « Le marchand doit précéder le soldat. » résume parfaitement la ligne de sa politique coloniale des années 1880-1890.

La question du partage colonial de l’Afrique ayant pris une tournure épineuse au début 1880, le Portugal demanda la tenue d’une conférence “internationale”, suggestion immédiatement relayée par Bismarck, qui y vit le moyen politique d’y introduire des investissements allemands. La conférence se tint donc à Berlin entre le 15 novembre 1884 et le 26 février 1885, réunissant 13 pays européens : l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, la Russie, la Suède, la Norvège, les Pays-Bas, le Luxembourg, et les États-Unis ( présents à l’initiative d’Henry Morton Stanley, l’agent américain du roi des Belges, Léopold II).
Pour l’Allemagne, les conséquences intérieures directes de cette phase d’expansion du domaine colonial entre 1895 et 1910 et du développement des flottes militaire et marchande qui en résulte, se manifestent par le développement des ports de Brême, de Hambourg et de leurs chantiers navals, induisant une forte hausse des commandes à l’industrie sidérurgique et minière.

En 1919, le traité de Versailles entérine la fin de l’Empire colonial allemand, dont les vainqueurs se partagent les colonies sous mandat de la Société des Nations (SDN).
La France obtient la majeure partie du Cameroun et la partie orientale du
Togo, qu’elle partage avec l’Empire britannique. La Belgique obtient le Ruanda-Urundi qui faisait partie de l’Afrique orientale allemande .Les puissances victorieuses agrandissent leurs empires coloniaux aux dépens de l’Allemagne mais aussi “punissent moralement l’Allemagne, responsable de la guerre mondiale et qui a fait acte de barbarie en Afrique, en ce sens, qu’elle a été incapable d’assumer la mission « civilisatrice » que les contemporains attachent au colonialisme”.
Le Royaume-Uni obtient, outre les territoires camerounais et togolais non-administrés par la France : Le Tanganyika, détaché de l’Afrique orientale allemande ; le Sud-Ouest africain, administrée par le dominion de l’Union d’Afrique du Sud ; la Nouvelle-Guinée et Nauru, administrés par le dominion d’Australie, les Samoa par le dominion de Nouvelle-Zélande ;
Afrique orientale allemande : Rwanda-Urundi-Tanzanie. 1885
Situés dans la région du Lac Victoria, au Nord-Est du Congo belge, les royaumes du Rwanda et de l’Urundi tombèrent dans la zone d’influence allemande telle que définie par la conférence de Berlin. Le gouvernement allemand annonça en 1885 qu’il autorisait Carl Peters, fondateur de la Société pour la colonisation allemande à établir un protectorat en Afrique de l’Est. Devant les protestations du sultan de Zanzibar (Britanique), Bismarck lui envoya 5 navires de guerre. L’Allemagne et la Grande-Bretagne se partagèrent alors le territoire de l’actuelle Tanzanie continentale. L’Allemagne prit possession de Bagamoyo, Dar es Salaam et Kilwa. La révolte d’Abushiri de 1888, fut maîtrisée avec l’aide de la Grande-Bretagne. En 1890, Londres et Berlin signèrent le traité de Heligoland-Zanzibar, qui donnait Heligoland à l’Allemagne et définissait les limites de l’Afrique orientale allemande – les frontières exactes ne furent tracées qu’en 1910.
Le comité économique colonial allemand est créé en 1896, comme une réplique de l’Union coloniale française de 1893. Les industriels dominent après 1907 et elle fédère 1.120 firmes ou corps constitués en 1913, encaissant 480.000 mark de cotisations et diffusant le journal Der Tropenpflanzer, fondé par Otto Warburg.
Ce botaniste de Hambourg a ramené de ses voyages en Malaisie, entre 1885 et 1889, de nombreux specimens qu’il a offerts au Jardin botanique et musée botanique de Berlin-Dahlem, créé en 1897, sous la direction d’Adolf Engler, professeur de botanique à l’université de Berlin, avec l’objectif d’étudier les plantes des colonies Plusieurs autres chercheurs allemands en botanique, comme Franz Stuhlman et Albrecht Zimmerman y contribuent à Der Tropenpflanzer, après avoir étudié le café à Java pour tenter de l’acclimater dans des lieux stratégiques comme le port d’Usumbura, sur le lac Tanganyika, où ils veulent implanter une grande station de recherche en botanique, le futur Institut de recherche botanique Amani(1901). Le meneur du projet est Adolf Engler, qui, convaincu du grand potentiel agronomique des Monts Usambara, s’y investit au début des années 1890.
Des défrichages massifs sont opérés par des planteurs allemands dès 1892. Le Dr Oscar Baumann explora le Rwanda par l’Est et poursuit vers le Burundi. 2 ans plus tard, le Comte von Gotzen fut reçu par le roi Kigeri IV Rwabugiri à Kageyo, et en 1898 que le Ruanda et l’Urundi furent intégrés à la Deutsch-Ostafrika, la présence allemande y étant toute symbolique, avec un poste militaire à Usumbura(Bujumbura). Très vite, des conflits émergent entre investisseurs, qui veulent une rentabilité caféière rapide et les scientifiques, qui veulent une station de recherche sur la flore indigène. Leur rêve est de tracer une carte très complète des espèces végétales sur tout le territoire, en gardant la plus grande biodiversité possible et en étudiant leur potentiel, au carrefour de l’économie, de la géographie et de l’agronomie, dans l’esprit des travaux d’Alexander von Humboldt et Charles Darwin.
En 1899, les planteurs ont déjà 6,5 M de pieds de café sur des domaines de plusieurs milliers d’hectares parfois, mais déplorent en 1902 la maladie qui s’en empare . Un an après son ouverture, l’institut n’a pas trouvé la cause du problème : une trop grande acidité des sols. Le prix du café chute des ¾ en 1903, l’année où Adolf Engler fait enfin le lien entre la rentabilité insuffisante et l’acidité des sols, et demande l’arrêt des défrichages. La forêt étant très dense et conquérante, seulement 2000 ha sont défrichés en 1906. Les planteurs ont fait venir de la main-d’œuvre immigrée, sur des parcelles de 100 ha plutôt en face ouest, où les caféiers se révèlent fragiles et succombent aux parasites et maladies, incitant Adolf Engler à demander l’arrêt de toute culture.

La résistance du peuple Hehe et Rébellion des Maji-Maji
Les Hehe sont une population bantoue d’Afrique de l’Est vivant en Tanzanie. On estime en 2006 que leur langue bantoue est encore parlé par 805 000 locuteurs. En 1891, le commandant allemand Emil von Zelewski dirige un bataillon de soldats (320 askaris avec officiers et porteurs) pour réprimer la rébellion Hehe. Ils sont attaqués à Lugalo par les 3 000 hommes de l’armée de Mkwawa qui, malgré le fait qu’ils ne sont équipés que de lances et de quelques fusils, maîtrisent rapidement les forces allemandes et tuent Zelewski.
En 1894, les Allemands, sous les ordres du colonel Friedrich von Schele, attaquent la forteresse du chef Mkwawa à Kalenga. Ils prennent le fort, après que plusieurs tribus se soient ralliées à l’Allemagne. Mkwawa réussit à s’échapper et entretient la guérilla jusqu’en 1898. Mais le 19 juillet, il est encerclé et se suicide pour éviter d’être capturé, avec son arme à feu. Les forces d’occupation allemandes peu nombreuses s’appuient sur quelques officiers pour maintenir l’ordre, collecter les impôts et gérer les cultures commerciales telles que le coton, le café et le sésame. Il en résulte un système centralisé et autoritaire.
Le corps de Mkwawa avait été décapité par les Allemands ; sa tête, mise à prix, fut envoyée en Allemagne. Après la 1° Guerre mondiale, le traité de Versailles mentionna dans la liste des réparations du guerre dues par l’Allemagne le retour en Tanzanie du crâne de Mkwawa. Cette restitution au peuple Hehe, prévue dans les 6 mois, fut finalement effectuée en 1954.
La rébellion des Maji-Maji en 1905 est maîtrisée par le gouverneur, le comte Gustav Adolf von Götzen. Cependant, les méthodes de l’administration coloniale sont vivement critiquées, ce qui pousse le chancelier Bülow à ordonner une réforme de l’administration coloniale en 1907. L’organisation traditionnelle des sociétés locales est davantage prise en compte ; on s’inspire également des méthodes françaises et portugaises, mais en comparaison de ces 2 dernières puissances, les colonies allemandes restent largement centralisées. Elle fut conquise par les armées britannique et belge pendant la 1° Guerre mondiale et fragmentée pour donner naissance au Ruanda-Urundi (Empire colonial belge) et au Tanganyika (Empire britannique).
Le Togo
Le pays Bassar au centre et au nord est devenu, à partir du VIIIe siècle, l’une des principales régions de production métallurgique d’Afrique de l’Ouest, pendant plusieurs siècles. Les forgerons exportaient le fer extrait de ses minerais jusqu’ au Nigeria. Des hauts-fourneaux mesuraient jusqu’à 4 m de haut, pour réduire le minerai en fer. Les Bassars, pour résister aux razzias, se réfugient dans les régions montagneuses lorsque arrivent de nouvelles populations déplacées par la traite des noirs, l’introduction de fusils ou les apports des colporteurs musulmans parlant haoussa et qui islamisent les savanes du nord et fondent des villes. Dans le Nord, les Gourma sont islamisés. Le centre et le sud du pays subissent les conséquences de la montée en puissance du Bénin, du royaume de Dahomey et du Ghana, à partir du XVe jusqu’au XVIIe siècle, au moment où les navigateurs portugais
João de Santarém et Pedro Escobar accostent vers 1470, sur «la Côte desEsclaves », avec ses ports négriers. L’intérieur du pays se trouve entre empire ashanti (1670-1957, Ghana) et royaume du Dahomey (1645-1900; Bénin).
Au XVIIe siècle, devenus nombreux, les Éwés se dispersent dans l’Ouest, jusqu’à la rive gauche de la Volta. Les missions catholiques puis protestantes aident les Portugais au commerce et à la traite négrière autour du comptoir nommée Petit-Popo (actuel Aného). Au XVIIIe siècle, les Danois venus de Christianenborg (l’actuelle Accra), s’implantent à leur tour. Ils sont suivis, à partir de 1780–1800, par des groupes de Hollandais, par des « Brésiliens », des anciens esclaves libérés et rapatriés du Brésil ou des descendants de Portugais installés au Togo, qui participent aux échanges côtiers. Francisco Félix de Souza (1754-1849), par exemple, important trafiquant d’esclaves brésilien, qui s’établit à Petit-Poto (futur chacha du Dahomey, l’actuel Bénin), fait fortune dans le commerce du tabac, du rhum, des tissus et dans la traite des esclaves. En 1880, le Togo actuel n’existe pas encore. Les Britanniques et les Français, occupant respectivement la «Gold Coast» ( Ghana, Bénin), installent des postes douaniers d’où ils tirent l’essentiel de leurs ressources, prélevées sur le tabac et l’alcool.

L’empire allemand est bien décidé à tirer profit de l’action des protestants de la mission de Brême pour disposer d’un empire colonial. Malgré les décès, ces missionnaires ont installé dès 1853, puis 1857, des points d’implantation chez les Ewes Anlo, à Keta et à Anyako, puis, en 1855 et 1859, chez les Ewes Adaklou et les Ewes Ho.
En 1883, le chancelier allemand Bismarck décide d’imposer un protectorat sur le Togo En 1884, l’explorateur allemand Gustav Nachtigal signe un «traité de protectorat» sur la plage de Baguida, avec le chef du lac Togo, Mlapa III de Togoville, représentant l’autorité religieuse du Togo, qui donna son nom au pays. En 1885,(conférence de Berlin), la côte togolaise est attribuée à l’Allemagne qui dans le cadre d’un négociation bilatérale avec la France, reconnaît ses droits sur la future Guinée en échange de son abandon des villages de Petit-Popo et de Porto-Seguro, sur la « côte des Esclaves ». L’Allemagne annexe rapidement, 85 000 km² de territoires. Elle fonde le port de Lomé et met en place une économie de plantations, propice à la culture du cacao et du café.
Mais, l’arrivée des Allemands se heurte à une plus forte résistance dans le Nord. La révolte des Kabyé (1890) et celle des Konkomba (1897) ont été matées violemment.

Elle encourage ses citoyens à s’installer dans sa colonie, le Togoland, en leur offrant des concessions à des conditions très avantageuses. Elle fait construire les infrastructures pour l’exploitation du coton et du cacao, des lignes de chemin de feren recourant massivement aux travaux forcés. Les Allemands en font une Musterkolonie ,une « colonie modèle » où doivent régner l’équilibre, la prospérité, où la langue allemande n’est pas imposée aux populations locales. La politique coloniale allemande est fondée sur la conviction que les races sont différentes et que la race blanche est supérieure aux autres. Dans cette logique, elle ne doit donc pas considérer l’indigène comme leur frère noir.
Vers, 1910, le pays compte 163 établissements scolaires évangéliques et 196 catholiques. Les missionnaires, tant catholiques que protestants, privilégient l’enseignement «en langue indigène» pour mieux convertir les «païens». La Mission de Brême assure l’enseignement primaire en éwé, tandis que la formation supérieure est dispensée en anglais, rarement en allemand. Ainsi l’influence de la langue allemande demeure presque nulle chez les Togolais. En 1914, aucune langue africaine ne peut faire état d’une littérature imprimée aussi abondante que l’éwé. En 1913, on ne compte que 4 écoles publiques (Regierungschulen), pour 341 élèves, et 348 écoles confessionnelles pour 14 000. Les Allemands capitulent dès le mois d’août 1914.

Le Cameroun
Les Duala vivaient, dans la région du Littoral du Cameroun, parlent une langue bantoue, Historiquement ils ont migré depuis une zone entre le Gabon et le Congo, jusqu’à à l’embouchure du fleuve Oli (wouri) Les Duala, peuple côtier, sont souvent tournés vers l’océan comme en témoignent leurs arts et activités traditionnelles, la pêche et les courses de pirogues. Ils avaient déjà passés plusieurs traités : le contrat anglo-douala en 1840, puis en1841 et en 1852. Le traité germano-douala signé en 1884 entre, d’une part, les rois Ndumbé Lobè Bell et Dika Mpondo Akwa et, d’autre part, Edouard Schmidt et Johannes Voss, représentant 2 firmes commerciales allemandes. Le lendemain, vu le contenu de ce traité « commercial », le consul allemand se déclare souverain sur le Cameroun. Douala (la capitale) devient protectorat allemand du Kamerun.
Les Allemands créent de grandes plantations de produits d’exportation, cacao, café, banane, caoutchouc, huile de palme. Pour l’exportation des produits cultivés, ils ouvrent des routes, construisent des ports et surtout des chemins de fer. Ils mettent en place les 1° infrastructures télégraphiques, téléphoniques et radiotélégraphiques.
Dans le sud forestier, en 1894, le Major Hans Dominik qui colonise et pacifie l’Est du pays en 1907, avait établi son poste militaire à Yaoundé où des relations amicales sont établies avec plusieurs chefs comme Charles Atangana, Nanga-Eboko. L’Allemagne envisage de se bâtir un grand empire africain, qui relierait, à travers le Congo, le Kamerun à ses possessions d’Afrique orientale. Elle atteint l’Adamaoua en 1899 et le lac Tchad en 1902, après des guerres meurtrières