
Après Bagdad « Fortress America One », le Liban, « Fortress America two » 1/2
Ce papier est publié à l’occasion du 40ème anniversaire de l’attentat contre l’ambassade des États Unis à Beyrouth Le 18 Avril 1983 un attentat s’est produit contre l’ambassade américaine à Beyrouth. À 13 heures et 3 minutes exactement, un pick-up chargé d’environ 900 kg d’explosifs s’écrasa contre la porte de l’ambassade. La puissance de déflagration est telle que l’onde de choc se propage à plusieurs kilomètres à la ronde. Selon le récit fait par Robert Baer, ancien agent de la CIA en poste au Moyen orient, les navires américains au large du Liban furent secoués par le souffle de l’explosion. Le bilan fut lourd: 63 personnes furent tuées, dont 17 Américain, parmi eux huit officiers de la CIA, dont le chef de la division Moyen-Orient, Robert Ames, le directeur adjoint de l’Agence des États-Unis pour le développement international et plusieurs Marines de la garde, 32 employés libanais et 14 visiteurs. Environ 120 autres personnes furent blessées.
Après Bagdad, le Liban, «Fortress America two» 1/2
Tragique est l’histoire des ambassades des États Unis au Moyen-Orient, centre du pouvoir décisionnaire de la zone pendant un demi siècle de la première puissance militaire planétaire de tous les temps, dont les servants ont souvent servi de défouloir, écornant bien au delà du raisonnable le prestige de l’hyperpuissance américaine.
Les États Unis, qui ont transformé le palais de l’ancien président irakien Saddam Hussein en une forteresse pour y loger leur ambassade dans la foulée de l’invasion américaine de l’Irak, en 2003, envisage de se doter d’une nouvelle forteresse, au Liban cette fois, afin de se protéger du courroux des peuples que leur politique impériale de morgue et de suffisance suscite à travers le Moyen- orient.
Les dommages collatéraux
Six ambassadeurs ont payé de leur vie, au titre de dommage collatéral, le prix de la politique impériale américaine et pas moins de quatre ambassades ont été détruites par des attentats suicides:
Au Soudan, en mars 1973, l’ambassadeur des États-Unis Cleo Noel, ainsi que son conseiller et le chargé d’affaires belge, sont pris en otage par un commando palestinien et exécutés deux jours plus tard.
Toujours au Soudan, 25 ans plus tard, en 2008, un diplomate, John Michael Granfield, 33 ans, travaillant pour l’USAID, active dans le sud semi-autonome du Soudan, est tué. L’attaque est intervenue sur fond de sentiments anti-américains exacerbés au Soudan où les autorités et les médias officiels ne cessent de dénoncer la position de l’administration des États-Unis sur la crise du Darfour.
A Chypre, en août 1974, Rodger Davies est tué par balles dans les locaux de l’ambassade à Nicosie lors d’une manifestation de Chypriotes grecs qui accusaient les États-Unis d’avoir soutenu l’invasion turque de la partie nord de l’île.
En Afghanistan, en février 1979, Adolph Dubs est tué dans l’assaut donné par les forces gouvernementales pour le libérer après son enlèvement à Kaboul par des islamistes radicaux.
En Libye, enfin, le 11 septembre 2012, l’ambassadeur des États-Unis en Libye Christopher Stevens et trois autres fonctionnaires américains sont tués dans une attaque contre le consulat de Benghazi, dans l’est de la Libye. L’attaque a été attribuée à des manifestants en colère contre le film islamophobe « L’Innocence des musulmans », une production amateur à petit budget réalisée aux États-Unis.
Des responsables libyens et américains n’ont pas écarté l’hypothèse d’une attaque planifiée, voire d’une implication du réseau Al-Qaïda.
Au niveau des ambassades
Les deux attentats contre les ambassades américaines en Afrique, le 7 août 1998, à Nairobi (Kenya), et à Dar es Salaam (Tanzanie) se placent parmi les plus importantes actions terroristes commises contre des cibles américaines sur le continent africain.
L’attaque à la voiture piégée contre l’ambassade de Nairobi a tué au moins 213 personnes dont douze Américains – dont deux employés de la CIA, blessé de 4 000 à 5 500 personnes, et détruit plusieurs grands immeubles situés en plein centre-ville.
L’attentat contre l’ambassade à Dar el Salaam, selon le même modus operandi, a tué onze personnes, mais aucune victime américaine, et en a blessé 85 autres. Le bâtiment a été fortement ébranlé et abîmé, mais n’a pas cédé sous la force de l’explosion.
Avec l’attentat du World Trade Center de 1993, l’attentat des tours de Khobar en Arabie saoudite et l’attentat contre le USS Cole au Yémen, les attaques des ambassades américaines en Afrique font partie des attentats anti américains les plus importants qui ont précédé ceux du 11 septembre 2001.
Détail piquant, les attentats anti-américains d’Afrique ont fait usage du même modus operandi que les kamikazes du Liban contre l’ambassade américaine à Beyrouth et les quartiers généraux français et américains, mais les auteurs étaient, eux, liés à des membres locaux d’Al Qaïda, c’est à dire au mouvement allié des États Unis dans la guerre anti soviétique d’Afghanistan. Terrible effet retour du boomerang.
Irak: L’ancien palais présidentiel de Saddam Hussein transformé en la «Fortress America»
En Irak, objet d’une invasion américaine en infraction du Droit international et à ce titre théâtre d’une vive résistance anti-américaine, les États Unis se sont dotés d’une ambassade décrite comme la plus grande et la plus chère du monde.
S’étendant sur 0,44 Km2, elle a été inaugurée en janvier 2009, dans la zone verte de Bagdad, dans un ancien palais de Saddam Hussein.
Cette nouvelle ambassade, aussi grande que le Vatican, compte 21 bâtiments, des restaurants, des magasins, des écoles, un cinéma, une caserne de pompiers et ses propres systèmes de production d’électricité et de traitement des déchets. Elle dispose aussi de ses propres moyens de télécommunication et d’un système de gestion des eaux usées.
Le domaine est 6 fois plus grand que celui du siège des Nations unies à New York, et fait les 2/3 de la taille du National Mall à Washington DC.
Surnommée Fortress America, elle comprend 21 bâtiments répartis sur 42 hectares et elle fonctionne de manière autonome, ne dépendant pas des services publics de la ville de Bagdad.
Elle a été construite à la suite de l’invasion américaine de l’Irak, en 2005, à partir des plans du cabinet d’architecture Berger Divine Yaeger inc. Neuf cents (900) ouvriers ont été mobilisés pour la construction de cet édifice terminé le 12 mai 2008 pour un coût d e 736 millions de dollars.
Située le long du Tigre, à l’ouest du pont 14 Juillet, date commémorative du coup d’État anti-monarchique, dans la Zone verte, 3.577 mille contractuels sont chargés de sa sécurité.
La forteresse fait néanmoins l’objet d’attaques sporadiques aux roquettes ou aux missiles, notamment depuis l’assassinat du général Qassem Souleimany, chef de la brigade de Jerusalem des Gardiens de la révolution iranienne.
Sur le bilan politique de l’invasion américaine de l’Irak, cf ce lien: https://www.renenaba.com/l-hecatombe-des-faiseurs-de-guerre/
Mais si l’ambassade américaine à Bagdad fait l’objet de tirs hostiles, en raison de l’invasion du pays par l’armée américaine et la résistance anti américaine qui s’y est développée, tel n’est pas le cas de l’Iran et du Liban, deux pays qui se placent néanmoins en tête des actions les plus humiliantes au prestige américain en ce que les opposants à la politique américaine se sont emparés des archives des missions américaines, révélant la mission clandestine de la chancellerie, décapitant ses agents attitrés, des membres de la CIA.
Iran: La crise des otages. Un camouflet majeur.
La crise des otages américains en Iran survient du 4 novembre 1979 au 20 janvier 1981. Pendant 444 jours, cinquante-deux diplomates et civils américains sont retenus en otage par des étudiants iraniens dans l’ambassade des États-Unis de Téhéran.
L’élément déclencheur aura été l’hospitalisation à New York, le 22 novembre 1079, du Chah déchu, mais la principale cause de cette crise est le soupçon d’espionnage des autorités iraniennes à l’égard de l’ambassade des États-Unis, qu’elles justifient par la découverte d’instruments de renseignement et de documents allant dans ce sens.
«Les Américains ont tenté de faire disparaître leurs documents confidentiels en utilisant des incinérateurs et des déchiqueteurs. Mais lorsque les étudiants ont vu de la fumée qui sortait du bâtiment, ils ont forcé l’entrée (du bâtiment) de l’ambassade et stoppé les agents » commente le guide, devant une des machines encore remplie de papier.
Quatre-vingt livres de documents secrets ont pu être reconstitués «grâce aux étudiants qui ont patiemment recollé les morceaux des documents broyés». Des livres sont consultables dans une des pièces du musée.
Les Iraniens exigeaient que les États-Unis reconnaissent leurs fautes passées, que fut le soutien américain indéfectible au Chah depuis l’Opération Ajax de l’été 1953. Cela équivalait pour Jimmy Carter à mettre en cause la politique de six présidents des États-Unis.
L’Opération Ajax, menée par la CIA, a visé à renverser le premier ministre nationaliste Mohamad Mossadegh, artisan de la première nationalisation pétrolière du tiers monde et le rétablissement dans son trône du chah d’Iran.
Véritable prise de guerre, l’occupation de l’ambassade américaine à Téhéran, en 1980, a permis la mainmise sur un important lot de documents confidentiels, détaillant l’architecture du réseau du renseignement américain au Moyen Orient et la liste des émargements.
ILLUSTRATION
L’ambassade des États-Unis à Beyrouth, au Liban, le 18 avril 1983, explosion d’une voiture piégée.

L’ambassade des États Unis au Liban ou la nouvelle forteresse américaine 2/2
Après «Fortress America» One à Bagdad : l’ambassade des États Unis au Liban ou la nouvelle forteresse américaine 2/2
1- Le déploiement diplomatique américain.
Les États-Unis occupent, après la Chine, la 2me position au niveau mondial par le nombre de ses représentations diplomatiques avec 166 ambassades sur les 193 pays membres de l’ONU.
A cela s’ajoute, un contrôleur d’état auprès du Vatican et deux ambassades au Kosovo et à Taïwan, deux pays nom membres des Nations Unies et deux délégués auprès d’ambassade en Syrie et en Iran, pays avec lesquels Washington n’entretient pas de relations diplomatiques.
Le Maroc a été le premier pays à avoir établi des relations diplomatiques avec les États-Unis, dès la fin de la guerre de sécession et la réunification du pays sous le commandement de George Washington, en 1777. En 1821, le Sultan du Maroc a d’ailleurs offert une parcelle de terrain aux États-Unis pour y édifier leur ambassade au Maroc.
En 1790, un consulat américain a été ouvert à Liverpool, le plus grand port britannique de l’époque pour le commerce transatlantique.
Dans la seconde moitié du XIX m siècle, l’ouverture des ambassades américaines se succédèrent, essentiellement pour des raisons économiques: Liberia, Grande Bretagne, France, Belgique, Russie, Mexique ainsi que des consulats en Irlande, au Canada, à Cuba et en Italie.
Après la 1 ère Guerre Mondiale (1914-1918), le Département d’État crée le «Bureau of Overseas Building Opérations» avec pour mission la construction des représentations diplomatiques américaines à travers le Monde.
Les États Unis seront le premier pays à reconnaître Israël en 1948 et James Mac Donald, conseiller du président Harry Truman, sera le premier ambassadeur américain accrédité auprès de l’État hébreu.
A l’époque de la guerre froide soviéto-américaine (1945-1990), les ambassades américaines bordant l’Union soviétique avaient une activité diplomatique stratégique maximale (Allemagne pour Berlin Est, Yougoslavie, Tchécoslovaquie; Turquie, le flanc sud de l’Otan, de même que les pays sous influence soviétique (Corée du sud pour la Corée du Nord; Vietnam du sud pour le Nord-Vietnam; le Brésil et le Yémen pour le Sud Yémen, à l’époque le seul pays arabe communiste. Cent vingt mille mètres carrés (120.000 m2) de surface bâties ont été édifiées durant cette période.
En 1990, dans la foulée de la 1ère guerre du Golfe, consécutive à l’invasion du Koweït par l’Irak, les néo-conservateurs américains ont mis l’accent sur le Moyen-Orient avec leur projet de «Grand Moyen-Orient»: Les ambassades américaines dans les pétro monarchies du Golfe, au Soudan, en Afghanistan, en Égypte et en Irak ont été agrandies et renforcées.
2 – La forteresse Aoukar: une forteresse destinée à compenser l’échec israélien au Moyen Orient.
L’ancienne ambassade américaine au Liban, détruite par l’attentat suicide de 1983, était située sur la corniche du front de mer, dans le quartier d’Ain el Mraisseh, le fief sunnite des nassériens libanais. A sa place trône désormais, comme de juste, la statue de Gamal Abdel Nasser, le président égyptien artisan de la première nationalisation réussie du Tiers monde, -le Canal de Suez- et bête noire de l’Occident.
La nouvelle est située, elle, à Awkar, une bourgade libanaise située dans le Caza du Metn au Mont-Liban dans ce qui fut durant la guerre civile libanaise, le réduit chrétien, sous l’autorité des milices chrétiennes du clan phalangiste des Gemayel. La population y est presque exclusivement chrétienne.
Les travaux d’agrandissement de la nouvelle ambassade américaine au Liban ont commencé, en 2006, à la suite d’un double échec: l’agression israélienne contre le fief du Hezbollah libanais au sud-Liban et dans la banlieue sud de Beyrouth, qui a abouti à l’élimination de la vie politique israélienne du premier ministre de l’époque Ehud Olmert; l’échec de la mainmise du gouvernement libanais sur le réseau des télécommunications stratégiques du Hezbollah, deux ans plus tard, en 2008, qui a abouti, là aussi, au dégagement de Fouad Siniora de son poste de premier ministre.
3- «Form Follow Function (FFF): Louis Sullivan, père spirituel des grattes ciels américains.
Le concept urbanistique qui a guidé la construction des ambassades américaines à travers le monde s’est inspiré au XX me siècle de l’enseignement de Louis Sullivan, le père spirituel des grattes-ciels, un des plus influents Maîtres de l’Architecture de l’École de Chicago, animateur de la doctrine architecturale de l’époque post révolution industrielle, théorisée par cette formule FFF «Form Follow Function. Autrement dit, la forme suit la fonction. Un principe de conception associé à l’architecture de la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle et au design industriel en général, qui stipule que la forme d’un bâtiment ou d’un objet doit principalement être liée à sa fonction ou à son objectif.
La nouvelle ambassade américaine à Awkar, au Liban, s’inspire, en l’amplifiant de cette doctrine.
Sur une superficie de quatre vingt dix mille mètres carrés (90.000 m2) de bâtiments couverts et 120.000 mètres carrés de construction sur des superficies découvertes se dressent les salles affectées aux activités habituelles des ambassades: Consulat, Presse, Culture, Service Économique etc..
La nouvelle ambassade abrite des centres d’études dotés d’équipements technologiques sophistiqués, protégés par un dispositif de grande sécurité, de même que des postes de commandement pour la direction des opérations militaires.
4- Hybrid Warfare ou les guerres asymétriques.
Le tout édifié avec du matériel composite (une combinaison de béton armé et fer), surmonté par des plaques ultra sensibles de pré-alerte pour détecter d’éventuelles menaces. L’ambassade a été équipée d’un double système de détection BMS et BAS, (des détecteurs quantiques par micro-onde), en vigueur dans les sites atomiques et les postes de commandement des bases militaires américaines.
Pour sacrifier à l’air du temps, l’ambassade abrite en outre un centre de repérage et de piratage informatique chargé du monde virtuel et des réseaux sociaux, ainsi qu’un centre de décryptage des données électroniques recueillies par les brigades électroniques opérant depuis l’ambassade.
Une section spéciale est affectée à la Société Civile et les ONG Organisations Non Gouvernementales, nouveau dada de la diplomatie américaine, de même que les partis politiques et les personnalités politiques, les journalistes alliés des Américains.
- Pour aller plus loin sur ce thème, cf ce lien :
https://www.madaniya.info/2016/02/26/liban-2005-2015-d-une-revolution-coloree-a-l-autre/
5- Beirut Digital District.
Fait inhabituel en ce que les ambassades veillent en général à ne pas faire étalage de leurs activités, mais plutôt à maintenir sinon secrète leurs activités clandestines, le nouveau siège de la mission américaine abrite «Beirut Digital District» une vaste salle pouvant contenir plusieurs milliers de personnes, non pas tant pour des concerts, mais plus vraisemblablement destinée à accueillir tous les «souverainistes» ceux qui émargent sur le budget américain, qui obéissent néanmoins au doigt et à l’œil à leur bienfaiteur américain.
Pour rappel: L’exfiltration du Liban par les États-Unis d’Amer Fakhoury, en mars 2020, ancien chef de la tristement célèbre prison de Khiam, au sud du pays, s’est produite par hélicoptère depuis le toit de cette nouvelle ambassade américaine. Mais le «Boucher de Khiam» ne survivra pas à ce passe droit exorbitant, résultant du fait du prince américain. Il décédera cinq mois plus tard des suites d’un cancer aux États Unis, à l’âge de 75 ans
La question qui se pose est de savoir pourquoi édifier un bunker dans le plus petit pays arabe dont l’armée a été constamment maintenue en état de sous équipement militaire pour sécuriser le primat israélien dans l’espace libanais?
La réponse est dans les faits qui se sont produits à Beyrouth 1983.
1983 passera en effet dans les annales diplomatiques américaines comme une «annus horribilis» par excellence avec deux attentats particulièrement meurtriers, au Liban. 1983, faut-il le souligner, c’esà à dire l’année qui a sui l’invasion israélienne de Beyrouth et la perte du sanctuaire libanais de l’OLP … qui a conduit le président Ronald Reagan à s’exclamer de joie «Bye Bye OLP», autrement dit à considérer comme anéantie toute résistance arabe à l’imperium israélo-américain. C’était sans compter sur la nouvelle forme de guerre asymétrique surgie des décombres de Beyrouth.
Le 18 avril 1983, sur fond des pourparlers libano-israéliens pour la conclusion d’un traité de paix, que s’est produit un attentat contre l’ambassade américaine à Beyrouth. À 13 heures et 3 minutes exactement, un pick-up chargé d’environ 900 kg d’explosifs s’écrasa contre la porte de l’ambassade. La puissance de déflagration est telle que l’onde de choc s’est propagée à plusieurs kilomètres à la ronde. Selon le récit fait par Robert Baer, un ancien officier traitant le CIA au Moyen Orient, les navires américains au large du Liban furent même secoués par le souffle de l’explosion.
Le bilan fut lourd: 63 personnes furent tuées, dont 17 Américains, parmi eux huit officiers de la CIA dont le chef de la division Moyen-Orient, Robert Ames, le directeur adjoint de l’Agence des États Unis pour le développement international et plusieurs Marines de la garde -, 32 employés libanais et 14 visiteurs.
Six mois plus tard, deux attentats à Beyrouth, le 23 octobre 1983 visaient les contingents américain et français de la Force Multinationale Occidentale. Le premier attentat a tué 241 soldats américains, le second 58 parachutistes français ainsi que quelques Libanais.
La décapitation de l’État major de la CIA pour le Moyen orient, une trentaine de personnes, lors de l’attentat contre le siège de l’ambassade américaine à Beyrouth, en 1983, de même que le dynamitage du PC des marines (214 tués), en même temps que le PC français, le Drakkar, en octobre 1983, constitueront de sérieux revers pour le renseignement occidental.
Un sérieux revers accentué par la prise en otage, le 16 mars 1984, de William Buckley, officiellement diplomate américain à Beyrouth, en fait un des animateurs de l’antenne de la CIA au Moyen orient, mort en 1985 en captivité, après avoir, semble-t-il, fourni des précieuses indications à ses tortionnaires. Sans compter le retentissant scandale de l’Irangate, la vente prohibée d’armes américaines à l’Iran, le scandale de la décennie 1980, allumé par une mèche à lente combustion depuis Beyrouth, pour finir par carboniser l’administration républicaine du président Ronald Reagan.
En superposition, de bon nombre de revers tant pour les États Unis, que pour Israël que leurs alliés libanais:
- L’annulation d’un Traité de Paix entre Israël et le Liban, la même année, 1983, sous l’effet d’une révolte de la population de Beyrouth, -fait unique dans les annales diplomatiques internationales;
- Le retrait israélien du sud Liban sans négociation ni traité de paix, 17 ans plus tard, -là aussi un fait unique dans les annales de la polémologie internationale-;
Le démantèlement d’un réseau d’espion à la solde des États Unis et d’Israël à l’occasion de la constitution d’un Tribunal Spécial sur le Liban pour juger les assassins de l’homme lige des Saoudiens au Liban, le milliardaire libano saoudien et ancien premier ministre Rafic Hariri, en 2005-2006, de même que son chef de sécurité le général Wissam Hassan, la dague sécuritaire du clan saoudo-américain au Liban. Autant de revers qui expliquent l’acharnement des États Unis à faire plier, sous divers prétextes, le plus petit pays arabe et le moins équipé militairement……..de l’affamer en vue de dresser la population contre le Hezbollah, la sentinelle de l’indépendance libanaise.
Depuis leur création en 1776, les États-Unis ont mené près de 400 interventions militaires, plus d’un quart d’entre elles ont eu lieu dans la période suivant la guerre froide. Un quart des 400 guerres américaines, soit 100 guerres, se sont déroulées au Moyen-Orient et en Afrique. Cf. à ce propos, Introducing the Military Intervention Project: A New Dataset on US Military Interventions, 1776–2019 et https://www.mondialisation.ca/les-70-ans-de-lotan-de-guerre-en-guerre-2/5632745
- Sur la guerre de l’ombre dont Beyrouth est le théâtre et le démantèlement du réseau d’espion pro-israélien, cf ce lien :
https://www.renenaba.com/le-tribunal-special-sur-le-liban-a-lepreuve-de-la-guerre-de-lombre/ - Pour les locuteurs arabophones, cf ce lien : L’ambassade américaine à Beyrouth : La base Awkar, Al Akhbar 29 décembre 2021
René Naba
Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe. Auteur de « L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres » (Golias), « Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français » (Harmattan), « Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres (Harmattan), « Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David » (Bachari), « Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias). Depuis 2013, il est membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme (SIHR), dont le siège est à Genève et de l’Association d’amitié euro-arabe. Depuis 2014, il est consultant à l’Institut International pour la Paix, la Justice et les Droits de l’Homme (IIPJDH) dont le siège est à Genève. Editorialiste Radio Galère 88.4 FM Marseille Emissions Harragas, tous les jeudis 16-16H30, émission briseuse de tabous. Depuis le 1er septembre 2014, il est Directeur du site Madaniya.